mardi 30 août 2016

Le taux de chômage peut-il s’expliquer par la qualité de l’éducation ?

Plus d’écoles, moins de chômage ? C’est ce que semble affirmer une étude publiée récemment par la banque Natixis. A l’approche de la rentrée, l’économiste Patrick Artus, dans son « Flash économie » du 3 août 2016 (un papier non académique destiné aux clients de la banque), affirme que « la qualité du système éducatif et du système de formation professionnelle joue […] un rôle majeur pour expliquer la performance économique et sociale » d’un pays.

Le papier croise les résultats obtenus par vingt pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) avec ceux des enquêtes PISA 2012 (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) et PIAAC (Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes) avec, entre autres, le chômage ou la productivité. Enseignement de cette étude :
« Un score PISA ou PIAAC élevé est bien associé à un taux de chômage et à un taux de chômage des jeunes faibles. »

Or, depuis 2000, si la France et l’Allemagne ont des résultats relativement similaires à ceux de l’enquête PISA, leurs taux de chômage varient du simple au triple. En 2015, le taux de chômage des Allemands âgés de 15 à 24 ans était de 7,3 % de la tranche d’âge, alors qu’il était de 24,7 % en France.

Pourquoi des notes similaires à celles des enquêtes PISA et PIAAC conduisent-elles à de telles différences au niveau de l’emploi ? Le raisonnement de l’économiste est fondé sur des corrélations statistiques, autrement dit la majorité des pays est regroupée sensiblement au même niveau avec les données étudiées.
Mais, en réalité, d’autres mécanismes entrent en jeu : regard différent porté sur les filières professionnelles d’un pays à l’autre, système de formation continue contesté, ou encore marché de l’emploi structuré différemment.

Corrélation ne veut pas dire causalité

C’est là une des faiblesses de l’étude : corrélation statistique est souvent synonyme d’« erreur écologique », fréquente dans les sciences économiques et/ou sociales. Elle consiste à attribuer aux individus ce qui est observé au niveau collectif.
Une relation constatée sur un ensemble de pays n’indique en rien qu’au sein d’un même pays la performance aux enquêtes PISA a un effet causal sur son taux de chômage. D’un pays à l’autre, les mécanismes qui régissent cette relation ne sont pas nécessairement identiques, et appellent donc des solutions spécifiques.

Faute de conditions de laboratoire qui permettent de vérifier l’existence d’une relation causale, les économistes disposent d’un autre outil : la « causalité au sens de Granger ». Pour peu que les résultats des enquêtes PISA et PIAAC à une certaine date (cause) affectent les futurs chiffres du chômage (conséquence), on pourra déceler une causalité.
Or, une telle affirmation impose une analyse temporelle bien plus complexe que les corrélations ou visualisations (voir graphique ci-dessous) effectuées ici.
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