lundi 22 juillet 2019

Entre opacité des chiffres et indifférence des autorités, les morts au travail encore largement ignorés

C’est en cherchant dans la presse quotidienne régionale qu’on les trouve. Un court article souvent, relatant l’accident mortel. Sous la mention « faits divers », Le Populaire du Centre faisait ainsi part, mardi 9 juillet, de la mort d’un ouvrier agricole de 18 ans, écrasé sous son tracteur à Saint-Jean-Ligoure (Haute-Vienne).


Le même jour, L’Ardennais relatait celle, sur un chantier, d’un ouvrier de 45 ans percuté par la chute du contrepoids d’une grue, à Herpy-l’Arlésienne (Ardennes).
La veille, Le Parisien informait du décès d’un mécanicien de 43 ans mort à Beautheil-Saints (Seine-et-Marne), coincé dans une arracheuse de lin.
On pourrait encore évoquer, depuis début juillet, ce manutentionnaire tombé d’un engin de levage en Seine-Maritime, cet ouvrier écrasé par une machine alors qu’il refaisait la chaussée de l’A7, dans les Bouches-du-Rhône, ou cet ascensoriste tué en Haute-Savoie.


Un « drame » ici, une « terrible tragédie » là. Une somme d’histoires individuelles. Mais que diraient ces accidents mortels de la réalité du monde du travail en France en 2019 si l’on les examinait dans leur ensemble ?


Un chiffre existe : celui des accidents du travail des salariés du secteur privé, recensés par l’Assurance-maladie. Il nous apprend qu’au moins 530 personnes sont mortes sur leur lieu de travail en 2017. Et cela sans compter les 264 qui se sont tuées sur leur trajet, ou les cas de suicide, qui nécessitent souvent un passage par le tribunal pour être reconnus comme des accidents du travail. Plus de dix personnes meurent donc au travail chaque semaine en France. A bas bruit.



samedi 20 juillet 2019

Don du sang : les règles imposées aux hommes homosexuels allégées

Le délai à respecter avant tout don, de douze mois après la dernière relation sexuelle, sera réduit à quatre mois à partir de février 2020. 


C’est la dernière étape avant que les hommes homosexuels ne rentrent dans le droit commun en matière de don du sang. Le ministère de la santé a annoncé, mercredi 17 juillet, la réduction – à partir du 1er février 2020 – de douze à quatre mois du délai permettant de donner son sang après la dernière relation sexuelle entre hommes. La « disparition de la référence à l’orientation sexuelle au profit de la recherche d’un comportement individuel à risque » devrait ensuite être envisagée à « l’horizon 2022 ».
Aujourd’hui, lors de l’entretien préalable à un don du sang, une personne hétérosexuelle se voit interdite de donner si elle a eu plus d’un partenaire sexuel au cours des quatre mois précédents. Un homme ayant des relations sexuelles avec des hommes, même s’il est en couple stable, est « présumé » à risque et ne doit donc pas avoir eu de relation sexuelle au cours des douze mois précédents.

Lors d’un don du sang  à Tours, en 2017.
Lors d’un don du sang  à Tours, en 2017. GUILLAUME SOUVANT / AFP

Cette période d’abstinence avait été la condition fixée par Marisol Touraine, la ministre des affaires sociales et de la santé de François Hollande, pour ouvrir, en juillet 2016, le don du sang aux hommes homosexuels. Cette démarche leur était interdite depuis 1983, le nombre de personnes contaminées par le VIH étant 65 fois plus élevé chez les gays que chez les hétérosexuels, et le taux d’incidence de la maladie (nombre de nouvelles infections enregistrées) étant 200 fois plus élevé, selon les chiffres de l’Institut de veille sanitaire (actuel Santé publique France) en 2015. Or, même si toutes les poches de sang sont testées, le virus n’est pas détectable dans le sang pendant douze jours.
Douze mois, « c’est le délai au terme duquel nous sommes certains, d’après les éléments scientifiques dont nous disposons actuellement, que le niveau de risque est identique entre homosexuels et hétérosexuels », avait expliqué Mme Touraine. La ministre présentait alors cette décision comme une première étape. « S’il n’y a pas de risques, les règles qui s’appliquent aux homosexuels seront rapprochées des règles générales l’année qui suit », soit en 2017, annonçait-elle dans Le Monde en novembre 2015.

jeudi 18 juillet 2019

Fin du numerus clausus, « hôpitaux de proximité », usage des données : le projet de loi santé adopté au Parlement

Sur fond de crise dans les urgences, la ministre Agnès Buzyn défend ce projet de loi qui doit permettre un « meilleur accès aux soins ». 


Réforme des études de santé, hôpitaux de proximité, accès élargi aux données de santé, lutte contre les déserts médicaux… Le Parlement a définitivement adopté mardi 16 juillet, par un ultime vote du Sénat, le projet de loi sur la santé, dont le système a besoin « en urgence », selon le gouvernement. Les sénateurs ont largement adopté le texte à main levée. Agnès Buzyn y voit un moyen « de nous armer face aux nombreux défis auxquels nous devons faire face et de garantir une offre de soin et de qualité pour tous ».

Le texte relatif à « l’organisation et à la transformation du système de santé » porté par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, avait fait l’objet d’un accord entre députés et sénateurs après son adoption en mars à l’Assemblée puis, dans une version différente, en juin au Sénat.

Sur fond de crise dans les urgences, Mme Buzyn défend un projet de loi qui doit permettre un « meilleur accès aux soins sur le territoire », et notamment d’améliorer « l’accueil en ville en amont des urgences ».

En voici les principales mesures :

  • Fin du numerus clausus


Le numerus clausus et le concours couperet limitant le nombre d’étudiants admis en deuxième année de médecine, dentaire, pharmacie et maïeutique (sage-femme) seront supprimés à la rentrée 2020. Les effectifs d’étudiants en deuxième ou troisième année seront déterminés par les universités, en accord avec les agences régionales de santé, selon les capacités et les besoins des territoires.

L’objectif est d’« augmenter de 20 % » environ le nombre de médecins formés, selon Mme Buzyn, tout en diversifiant leurs profils, grâce à des passerelles entre les cursus et des critères de sélection qui restent à préciser par décret.

Lire l’analyse : Fin du numerus clausus en médecine : une promesse en trompe-l’œil

Les « épreuves classantes » en fin de sixième année de médecine vont également disparaître au profit de nouveaux examens.

Des ordonnances gouvernementales définiront par ailleurs les conditions d’une « re-certification » régulière des médecins, infirmiers et encore pharmaciens, pour vérifier que leurs compétences sont à jour.

mardi 16 juillet 2019

La faim s’étend dans le monde pour la troisième année consécutive alerte l’ONU

Après des décennies de baisse, il s’agit de la troisième année consécutive de hausse de la sous-alimentation.

La faim dans le monde continue d’affecter de plus en plus de personnes à cause des conflits et des dérèglements climatiques. En 2018, elles étaient 821,6 millions à en souffrir, contre 811 millions l’année précédente, selon un rapport annuel de l’ONU publié lundi 15 juillet.
« C’est une mauvaise tendance », a résumé lundi lors d’une conférence de presse au siège des Nations unies le patron du Programme alimentaire mondial (PAM), David Beasley. Et d’avertir : « Sans sécurité alimentaire, nous n’aurons jamais de paix et de stabilité ! » Partout où des groupes extrémistes ont de l’influence, la faim est utilisée par eux comme une arme pour diviser ou recruter, a précisé le responsable onusien, en évoquant en exemple le Sahel.

2 milliards de personnes touchées

Après des décennies de baisse, il s’agit en outre de la troisième année consécutive de hausse de la sous-alimentation, appelée aussi insécurité alimentaire.
En ajoutant les populations souffrant de famine aux personnes touchées par l’insécurité alimentaire, l’ONU estime dans son rapport annuel que plus de deux milliards de personnes n’ont pas régulièrement accès à des aliments sains, nutritifs et en quantité suffisante. Parmi elles, 8 % vivent en Amérique du Nord et en Europe.

Le document souligne que les chiffres de 2018 font de l’objectif d’un monde sans aucune personne en état de sous-alimentation un « immense défi ». Ce but faisant partie des 17 Objectifs de développement durable établis par l’ONU pour être atteints en 2030 est hors de portée, a asséné David Beasley, en déplorant qu’on parle davantage dans les médias de Donald Trump ou de Brexit que des enfants qui continuent de mourir de faim dans le monde.
Le rapport a été rédigé par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), avec le concours du Fonds international pour le développement de l’agriculture, de l’Unicef, du PAM et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
« Il est essentiel de mettre en place des politiques économiques et sociales pour contrecarrer à tout prix les effets des cycles économiques défavorables, tout en évitant de réduire les services essentiels tels que les soins de santé et l’éducation », affirme le document.

 

samedi 13 juillet 2019

Fin de vie, euthanasie, sédation profonde, ce que permet et interdit la loi

Le décès de Vincent Lambert remet sur le feu de l'actualité la fin de vie, l'euthanasie, les directives anticipées. L’occasion de rappeler ce que dit la loi actuelle en France et ailleurs.


Il y a quelques mois, dans une tribune  publiée dans le quotidien Le Monde, daté du 28 février 2018, 156 députés dont 122 LREM demandaient une nouvelle loi sur la fin de vie. L'objet : donner aux malades en fin de vie la libre disposition de leur corps ».
Rappelons que le 20 décembre 2017 les députés de la France Insoumise avait déposé sur le bureau de l'Assemblée Nationale une
proposition de loi relative à l'euthanasie et au suicide assisté pour une fin de vie digne
Trois ans après l’adoption de la loi Leonetti-Claeys du 2 février 2016 rien n’est réglé et de plus en plus de Français se rendent en Belgique où l’euthanasie est légalisée. Faut-il de nouveaux droits à ce qui était déjà en 2016 des nouveaux droits aux personnes en fin de vie ? Et quels droits ?

jeudi 11 juillet 2019

L’expérimentation du cannabis thérapeutique officiellement autorisée en France

Une décision de l’agence française du médicament ouvre la voie à un test en situation réelle réservé aux patients en impasse thérapeutique. 


C’est une nouvelle étape vers l’expérimentation du cannabis thérapeutique en France : l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a validé jeudi 11 juillet le cadre proposé fin juin par un groupe d’experts. « Le cadre global qu’ils posent est un cadre à partir duquel on peut travailler, leurs propositions nous paraissent des bonnes propositions », a précisé à l’Agence France-presse Dominique Martin, directeur général de l’ANSM.

Saluant un travail « remarquablement conduit », le dirigeant souligne que le comité a « pris le temps nécessaire d’écouter les uns et les autres », dans les différentes dimensions du dossier – médicales, économiques, associatives – et n’a « pas perdu de temps » depuis sa nomination. L’ANSM, qui avait donné fin 2018 un accord de principe au lancement d’une expérimentation du cannabis thérapeutique en France, avait alors demandé à ce comité de se pencher sur la forme à donner à cette opération. L’enjeu étant que l’ampleur de l’expérimentation et la qualité des données recueillies soient suffisantes pour, à son terme, juger de la pertinence d’une légalisation du cannabis à visée médicale.


Un plant de cannabis thérapeutique, Israël, le 24 janvier 2019.
Un plant de cannabis thérapeutique, Israël, le 24 janvier 2019. Amir Cohen / REUTERS

Pas de « joint sur ordonnance »

Pour ce test en situation réelle, le cannabis thérapeutique pourra être prescrit chez des patients en impasse thérapeutique, souffrant de certaines formes d’épilepsies résistantes aux traitements, de douleurs neuropathiques (résultant de lésions nerveuses) non soulagées par d’autres thérapies, d’effets secondaires des chimiothérapies ou encore pour les soins palliatifs et les contractions musculaires incontrôlées de la sclérose en plaques ou d’autres pathologies du système nerveux central.
Lire aussi Le cannabis thérapeutique, « je n’ai trouvé que ça qui me soulage vraiment »
Pas question toutefois de « joint sur ordonnance » : les produits prescrits seront inhalés (huile, fleurs séchées) ou ingérées (solutions buvables, gouttes et capsules d’huile). Le comité de treize spécialistes, présidé par le psychiatre et pharmacologue Nicolas Authier, a aussi recommandé de réserver la « prescription initiale » de produits à base de cannabis aux médecins exerçant dans des centres de référence (centres anti-douleur, centres experts de la sclérose en plaques, etc.). Les médecins participant à l’expérimentation seront volontaires et auront obligatoirement suivi une formation en ligne, dont les modalités restent à déterminer.

Source : Le Monde, 11/07/2019.

lundi 8 juillet 2019

Travailler plus de 10 heures par jour pourrait augmenter le risque de faire un AVC

Une étude française publiée fin juin montre que les gros travailleurs sont légèrement plus exposés à l’attaque cérébrale que ceux travaillant moins.


Il y a quelques semaines, Isabelle a fait un accident ischémique transitoire (AIT). Cette attaque cérébrale brève qui ne laisse pas de trace n’est pas à prendre à la légère car, dans 20 % des cas, elle précède l’accident vasculaire cérébral (AVC). La quinquagénaire est persuadée que son rythme de travail a joué un rôle dans la survenue de cette alerte. «J’élève seule mes deux enfants à Paris et pour joindre les deux bouts, en plus de mon activité salariée, déjà très prenante, cela fait plusieurs années que je fais des traductions le soir et les week-ends. Je suis épuisée», raconte-t-elle.
Isabelle ne croit peut-être pas si bien dire. Une étude française, publiée fin juin dans la revue médicale Stroke, vient en effet de montrer que les gros travailleurs sont plus exposés à l’attaque cérébrale que ceux travaillant moins. Le risque d’accident vasculaire cérébral augmenterait ainsi de 29 % chez les personnes travaillant plus de dix heures par jour, au moins 50 jours par an. Un danger qui croît avec le temps. Ainsi, lorsque la situation dure depuis plus de dix ans, le risque augmente de 45 %! Ces résultats confortent ceux d’une étude publiée dans la revue The Lancet en 2015 qui montrait une hausse de 33 % du risque chez les personnes dépassant les 55 heures hebdomadaires. «Il ne s’agit pas pour autant d’être alarmiste. Le risque demeure faible: il passe de 0,8 à 0,93 %», rassure le Pr Alexis Descatha, spécialiste des pathologies liées au travail à l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches et coauteur de l’étude.

Plusieurs explications

Par ailleurs, si l’étude montre une association significative entre temps de travail et risque pour le cerveau, elle ne permet pas de conclure à un lien de causalité, précisent les chercheurs qui se sont appuyés sur les données de la cohorte française Constances regroupant 200.000 personnes âgées de 18 à 69 ans. Pour expliquer cette association, le professeur Alexis Descatha avance deux hypothèses. «Travailler de manière prolongée dans de mauvaises conditions ou sous pression peut soit avoir un effet direct en affectant la coagulation et le rythme cardiaque. Mais le risque augmente aussi de façon indirecte en raison des modifications de comportements liées à ces horaires», affirme le médecin.

Les durées de travail à rallonge riment souvent avec le stress, qui est connu pour faire grimper la pression artérielle, principal facteur de risque de l’attaque cérébrale. Tout comme le travail de nuit. «Physiologiquement, la nuit, la pression artérielle diminue de 10 à 20 %. Cette fonction protectrice est alors perturbée par la modification du rythme veille-sommeil», explique le professeur Yannick Bejot, qui dirige le registre dijonnais des AVC, étudiant l’épidémiologie des maladies cérébro-vasculaires. Le travail de nuit va également déréguler la prise alimentaire et la sécrétion d’insuline, faisant le lit du surpoids et du diabète, autres facteurs de risques d’attaques cérébrales.

Hygiène de vie négligée

Parallèlement, la plupart des professionnels ayant une activité intense négligent leur hygiène de vie, aggravant la menace. En effet, on sait depuis l’étude internationale Interstroke que dix facteurs de risques modifiables contribuent à la survenue de 90 % des AVC. Outre l’hypertension, figurent le tabagisme, un rapport taille-tour de hanche élevé, la sédentarité, une alimentation défavorable à la santé ou encore une consommation excessive d’alcool… «On sait aussi que la prise chronique de neuroleptiques ou de certains antidépresseurs est susceptible d’augmenter le risque», précise le professeur Norbert Nighoghossian, responsable du service des urgences neurovasculaires au CHU de Lyon.
C’est pourquoi, pour ceux qui ont du mal à lever le pied ou qui ne peuvent pas se le permettre, les spécialistes recommandent de corriger les habitudes de vie et les comportements délétères pour le cerveau «Il s’agit par exemple d’éviter les sandwichs pris sur le pouce, d’aménager des périodes de repos ou encore d’arrêter le tabac et de surveiller sa consommation d’alcool», précise le professeur Yannick Bejot. Une prévention plus que jamais nécessaire lorsque l’on sait qu’avec 140.000 nouveaux cas par an, l’AVC est la première cause de handicap acquis de l’adulte et la deuxième cause de démence après la maladie d’Alzheimer.
Et après un premier accident, qu’il survienne sous forme d’AIT, comme dans le cas d’Isabelle ou d’AVC mineur sans séquelles, il faudra redoubler de vigilance. «Après ces événements, 30 à 50 % des patients décrivent pendant plusieurs mois une extrême fatigue avec des troubles de la concentration, de l’attention et de la mémoire», affirme le professeur Yannick Bejot. Or ces personnes, qui ne présentent pas de séquelles visibles, ne peuvent pas bénéficier d’aménagement du temps de travail. Si elles étaient déjà en surcharge de travail, elles seront sans doute conduites à adopter des comportements à risque qui les mettront en danger.

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Article intégral en ligne : http://sante.lefigaro.fr/article/travailler-plus-de-10-heures-par-jour-pourrait-augementer-le-risque-de-faire-un-avc/
Source : Le Figaro.fr,  02/07/2019.