dimanche 30 novembre 2014

Actualités

Le 9 décembre 2014 , intervention du groupe GENEPI sur la plage d'intervention de préparation aux concours de Travail social (14h -17h EFMS de Talence) avec Marie - Claudine DUBOIS Formatrice

Merci de consulter le site carceropolis.fr


Bonne semaine à tous ;

vendredi 28 novembre 2014

Simone Veil par Emmanuelle Devos

Le téléfilm de France 2 "La loi" retrace la genèse du vote du texte qui a dépénalisé l'IVG en 1974. La comédienne raconte comment elle a abordé ce rôle et incarné ce personnage d'exception.

PREPARATION
« J'avais un mois et demi, ce qui n'est vraiment pas énorme. D'autant qu'à l'époque, j'étais au théâtre, et répétais dans la journée une autre pièce que je joue en ce moment. Le soir, quand je me maquillais dans ma loge à Edouard-VII, je me passais les discours et les interviews de Simone Veil sur mon téléphone. Je l'ai regardée le plus possible jusqu'à ce qu'elle me rentre dans le corps. »
« J'ai visionné beaucoup d'images - merci INA.fr ! - qui remontent à l'époque de son arrivée au gouvernement Chirac. C'est à ce moment-là que Simone Veil devient un personnage public. C'est l'une des rares femmes ministres et les médias lui consacrent beaucoup de sujets. Elle a un mal fou à apprivoiser la caméra. Je me souviens d'une émission présentée par Bernard Pivot où on la sent presque frigorifiée. Sa grande copine, la réalisatrice Marceline Loridan-Ivens, est également invitée, mais Veil est tellement timide qu'elle ne peut s'empêcher de la vouvoyer. Pivot, qui connaît leur complicité hors plateau, est tellement surpris par sa raideur qu'il l'invite à plus de familiarité. Elle finit par s'exécuter, en marche forcée, comme une bonne élève... Entre 1974 et 1976, tout ce qui relève chez elle de l'intime, du sentiment personnel, ne transparaît pas à l'image. Il lui a fallu deux ans pour apprivoiser la caméra. Après, elle change, on la sent plus aguerrie médiatiquement, plus sûre d'elle. En revanche, ce qui explose à l'écran dès ses débuts, c'est son incroyable ténacité. »

TRANSFORMATION
« Il suffit de se faire un chignon, d'enfiler un tailleur Chanel et hop !, c'est parti, tout le monde a un air de Simone Veil. J'avais en plus la chance de lui ressembler un petit peu. On a le même front, la même implantation de cheveux, les mêmes pommettes. Le bas du visage est moins identique mais quand même. Tout cela m'a permis de m'occuper davantage de l'intérieur, de transcrire cette réserve mêlée d'autorité. Je l'ai regardée et écoutée tous les jours pendant un mois et demi. D'abord, elle est assez peu expressive. Elle est toujours très posée, un peu raide, ne fait pas de geste de mains. Elle a les pieds bien ancrés dans la terre. C'est toujours plus facile d'incarner quelqu'un comme ça qu'une personnalité volubile avec des tics. Elle a des regards de côté... J'étais obsédée par sa manière de prononcer les "a". Ca ne rendait pas exactement comme je le voulais, j'ai fini par abandonner. »


TAILLEUR
« Contrairement à la préparation classique d'un tournage où l'on cherche à perdre 3 kilos, cette fois-ci, je n'ai pas fait de régime. Si vous faites un petit 36, un tailleur en tweed de chez Chanel vous fait prendre deux tailles immédiatement. Ces vêtements sont terrifiants... Simone ne portait que des vêtements qui grossissent... »

FEMINISME
« Je croyais que sa construction de femme débutait réellement au sortir des camps. Or elle a commencé bien avant, dès l'enfance, avec sa mère. C'était une femme très belle, avec un air de Greta Garbo, qui a abandonné ses études de chimie quand elle s'est mariée. J'ai pu voir ses photos... Simone a réalisé très jeune que sa mère était affectée par son statut de femme soumise, contrainte à la seule tenue du ménage. La banalité du quotidien de ce que subissaient les femmes des années 1930... Ma propre grand-mère me racontait le même genre d'humiliations : la réticence à demander de l'argent à son mari, ne serait-ce que pour financer des tâches domestiques de base, l'incompréhension dudit mari qui soupire, qui renâcle, qui lâche des "encore ?"... La mère de Simone ne cessait de lui dire ainsi qu'à sa soeur : "Il faut que vous ayez un travail, que vous gagniez de l'argent par vous-mêmes." Simone Veil est devenue féministe à ce moment-là. Elle a eu 3 fils et raconte souvent qu'elle prend position contre eux, par solidarité pour ses belles-filles. »

SA MERE
« Quand, à 60 ans passés, Simone l'évoque dans les interviews, elle a encore les larmes aux yeux. Elle la décrit comme une femme intègre, charismatique, d'une grande bonté dont les gens abusaient... Elle l'appelle «môman» comme si elle avait 4 ans. C'est bouleversant... Sa tristesse, son côté apeuré viennent de la perte de cette mère adorée. A Auschwitz, elles sont parvenues à rester ensemble avec sa soeur. Un coup de chance... Une kapo a vu Simone et lui a dit : "Tu es trop belle pour mourir ici." Et l'a envoyée dans un camp de travail annexe où les conditions étaient un peu moins dures. Simone a accepté à condition de venir avec sa mère et sa soeur, "Milou". La kapo n'y a pas vu d'inconvénient. Ils avaient besoin de quatre femmes. Mais cette petite faveur n'a hélas pas sauvé sa mère. Elle est morte du typhus à Bergen-Belsen. »

VIE PRIVEE
« Elle se raconte plus durant ses interviews que dans son propre livre "Une vie", où elle ne parle que de politique, de Bernard Pons, de Bayrou, qu'elle ne supporte pas, qui lui a fait tel coup... Mais de son moi profond, rien ou presque. Elle a perdu un fils. Elle n'a jamais raconté quand, comment, de quoi il était mort... J'ai regardé sur Google, rien... »

OMERTA
« Je ne l'ai jamais rencontrée. Pas plus que son entourage familial ou professionnel. J'ai essayé, d'accord plutôt mollement, mais... Ses fils n'ont pas voulu me parler, de même qu'un de ses anciens directeurs de cabinet. Je pense qu'une consigne est passée dans son entourage pour ne rien dire. Ses fils ont vu le film et sont ravis qu'on ne leur ait pas demandé la permission de le tourner parce qu'ils ne l'auraient pas donnée. Il paraît qu'elle est très diminuée. Je ne sais pas s'ils vont lui montrer... »

SENS POLITIQUE
« Le film rend hommage à son acuité politique, alors qu'elle-même affirme ne pas être une femme politique. Elle répète à l'envi qu'elle vient du droit civil, de la magistrature, qu'elle n'a pas fait Sciences-Po, l'ENA, etc. C'est une contradiction assez amusante. Sa grande intelligence a consisté à ne pas porter le débat sur la question du féminisme. Elle a laissé ça à Françoise Giroud pour se focaliser essentiellement sur le terrain de la santé publique. Sans cela, les vieux barbons de la droite de l'époque n'auraient jamais voté. Une partie de son clan avait déjà tenté de faire passer la loi un an plus tôt. Et puis Giscard l'a relancée avec l'idée de la faire incarner par une femme. »

HUMOUR
« Avec la pression d'incarner une personne vivante, je n'étais pas légère, alors qu'on l'est quand on tourne ce genre de film. Je craignais aussi le manque d'humour du personnage. Je disais à Christian Faure [le réalisateur, NDLR] : "Elle peut faire un petit sourire, là, non ?" Mais non, il avait trop peur qu'avec Lorànt Deutsch [dans le rôle de son directeur de cabinet], on glisse inévitablement dans la gaudriole, vers un truc trop familier qui s'éloignerait du personnage. »

TOURNAGE
« Ce genre de sujet se prête parfaitement à la télé. Parce que c'est populaire dans le sens où il faut que ça soit vu sans faire l'effort de se déplacer. D'accord, il y a un côté un peu didactique dans le film, mais utile. En revanche, il y a deux problèmes majeurs à la télé. Le premier, c'est que vous n'avez pas une scène qui fasse plus d'une page. Il faut que ça aille vite, tout le temps, il faut changer de mouvement, d'endroit. Dans l'absolu, j'aurais rêvé d'un truc du genre "A la Maison-Blanche" ou "les Hommes du président"... Mais bon, je pense qu'ils ont peur que les gens zappent... Le second problème, c'est le manque de temps. Quand on vient du cinéma, c'est vraiment dingue... Si vous ne "story-boardez" rien, si vous hésitez un peu sur la place que vous accordez à la caméra, vous êtes mal. Heureusement, Christian avait tout préparé avant de manière à ne se consacrer qu'aux acteurs sur le tournage. »

Guillaume Loison, Nouvel Observateur,24 novembre 2014.
Revoir le téléfilm La Loi : http://pluzz.francetv.fr/videos/la_loi_le_combat_d_une_femme_pour_,112832079.html



 

mercredi 26 novembre 2014

Il y a 40 ans, Simone Veil montait au créneau en faveur de l'IVG

Le 26 novembre 1974, Simone Veil tenait à la tribune de l'Assemblée nationale un discours historique pour défendre sa loi légalisant l'avortement. Elle va faire face à des adversaires déchaînés, des réactions d'une rare violence.


Devant une assemblée qui compte 9 femmes pour 481 hommes, la ministre s'exprime d'une voix calme, un peu tendue: "Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les 300000 avortements qui chaque année mutilent les femmes dans ce pays, bafouent nos lois et humilient ou traumatisent celles qui y ont recours".


Simone Veil à l'Assemblée en 1974
AFP

"Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit de les écouter. C'est toujours un drame", assure-t-elle tout en soulignant que "l'avortement doit rester l'exception, l'ultime recours pour des situations sans issue". Son discours d'une heure est chaleureusement applaudi par la gauche. La droite se tait, pour l'instant. Dans les tribunes du public, à l'inverse de l'hémicycle, ce sont les femmes qui dominent, venues en masse écouter la ministre.
Suivent alors plus de 25 heures de débats durant lesquelles Simone Veil affronte insultes et propos de "soudards", racontera-t-elle, pendant qu'à l'extérieur, des militants anti-avortement égrènent leurs chapelets. Trois jours et deux nuits de combat contre les tenants de sa propre majorité.


Michel Debré, ancien Premier ministre du général de Gaulle, voit dans ce texte "une monstrueuse erreur historique". Les députés de droite René Feït et Emmanuel Hamel diffusent dans l'hémicycle, à tour de rôle, les battements d'un cœur de fœtus de quelques semaines. Le premier affirme que si le projet était adopté "il ferait chaque année deux fois plus de victimes que la bombe d'Hiroshima". Jean Foyer, ancien Garde des Sceaux du général de Gaulle, lance: "Le temps n'est pas loin où nous connaîtrons en France ces avortoirs, ces abattoirs où s'entassent des cadavres de petits hommes".
Le pire reste à venir: Hector Rolland reproche à Simone Veil, rescapée des camps de la mort, "le choix d'un génocide". Jean-Marie Daillet évoque les embryons "jetés au four crématoire". Jacques Médecin parle de "barbarie organisée et couverte par la loi comme elle le fut par les nazis".


 L'Humanité, vendredi 21 novembre 2014.

lundi 24 novembre 2014

Contre les violences faites aux femmes : l’urgence de mobiliser les médecins

Longtemps, les médecins, comme toute la société, n’ont rien voulu connaître des femmes violées, agressées sexuellement, battues. Ce déni recule et les praticiens sont sensibilisés à cette réalité dès leurs études. C’est encore insuffisant pour prendre en charge celles qui souvent se taisent et se refusent à porter plainte. Comment alors détecter les violences et secourir les victimes ? Des praticiens ont élaboré un protocole. qu’ils ont remis à Marisol Touraine, ministre de la Santé. Elle devrait, le 25 novembre, Journée contre les violences faites aux femmes, annoncer des mesures pour aider les praticiens à diagnostiquer et à accompagner.


Il suffit parfois d’une question posée par le généraliste, l’urgentiste, le gynécologue. « Madame, avez-vous subi des violences ? », « Les rapports sexuels sont-ils consentis ? »... Dans les consultations, ils sont de plus en plus nombreux à les formuler. Certes le corps médical revient de loin. Pendant longtemps ceux qui tentaient de le sensibiliser se voyaient répondre : « Je ne suis pas policier », « C’est un problème familial ». « Il y a 40 ans, on nous traitait de féministes excitées », explique Emmanuelle Piet, médecin et présidente du Collectif féministe contre le viol (CFCV). Un peu à l’image de la société. Ainsi, dans les 23 manuels de gynécologie, seuls 6 mentionnent – en une ou deux lignes – une hypothèse de violences en lien avec la grossesse ! Pourtant petit à petit les choses avancent. Deux questions ayant trait aux violences faites aux femmes ont été ajoutées en 2014 à l’internat, la 7e année d’étude. « Ça ne paraît rien, mais cela oblige à bosser la question », se réjouit Emmanuelle Piet. Dans les facultés de médecine aussi, des modules ont vu le jour.

EN FINIR AVEC LA HONTE


Gilles Lazimi, généraliste au Centre de santé municipal de Romainville (93), et membre du Haut Conseil à l’égalité pour les femmes et les hommes, pose des questions depuis longtemps. En 2004, dans le cadre d’une campagne, des femmes victimes de violences s’affichaient sur le mur du centre, « une patiente a éclaté en sanglots. Ça faisait pourtant des années que je la suivais », raconte le médecin. « Depuis, je pose systématiquement la question. Ça fait partie de l’interrogatoire médical. » Dans tous les cas, les patientes sont soulagées : « C’est une libération de la parole pour des femmes qui ont été pendant des années sous la coupe d’un agresseur. Ça permet de faire changer la honte de camp, en leur disant “je vous crois, il n’a pas le droit” » (voir témoignage). Depuis des années, les associations comme la MIPROF (la Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains) se battent pour ce questionnement systématique afin de détect erces violences.





PHOTO REMY GABALDA/AFP
LES CONSULTATIONS MÉDICO- JUDICIAIRES, SEULES APTES À RECUEILLIR DES PREUVES , NE SONT QUE 48 SUR LE TERRITOIRE.

En 2013, 121 femmes ont été tuées par les coups de leur conjoint ou exconjoint. 90 000 femmes adultes sont violées chaque année. 201 000 sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur conjoint. Et ce dans tous les milieux sociaux. Mais « il y a des moments clés comme la grossesse », rappelle Emmanuelle Piet. Dans 40 % des cas, les violences commencent pendant celle-ci. « Une femme va voir une vingtaine de fois un professionnel de santé pendant ces 9 mois, ça laisse le temps de poser quelques questions », continue-t-elle. Les violences faites aux femmes sont un enjeu de santé publique. « On estime le coût à 2,5 milliards d’euros par an. » « Elles amplifient toutes les pathologies. À long terme, des syndromes de stress post-traumatique, tentatives de suicide, dépressions, hospitalisations... », explique la médecin. Pour lutter, Annie Soussy, responsable du service de consultation médico-judiciaire de Créteil, Marie Fontanel, directrice adjointe de l’ARS Alsace, et Patrick Pelloux, urgentiste au SAMU de Paris, ont planché sur un protocole national, rendu à Marisol Touraine, la ministre de la Santé, le 5 novembre. « Avec un maître mot : on ne perd plus une seule victime dans les méandres médico-psycho-administratif. En 2013, à Paris, 500 femmes se sont présentées aux consultations médico-judiciaires (CMJ), ça veut dire à peine 20 % des victimes de viol », dénonce Patrick Pelloux. Parmi les recommandations : les questions systématiques aux patientes, la délivrance de certificats médicaux plus descriptifs, et une prise en charge multidimensionnelle dans les services d’urgences (notamment recueil des vêtements dans des conditions qui font que la recherche ADN sera possible). « Aujourd’hui, nous ne savons pas trop quoi faire. Nous voulons pouvoir envoyer le SAMU, faire les prélèvements nécessaires, prévenir la police et l’amener aux urgences ou aux CMJ pour les examens. L’idée n’est pas d’être des shérifs, mais de bien faire notre travail pour aider la patiente. Mais cela va demander une modification du Code de procédure pénale », explique Patrick Pelloux. Car, jusquelà, seules les CMJ sont habilitées à recueillir les preuves après réquisition de la justice. « Or il n’y en a que 48 en France. »

TRAVAILLER EN RÉSEAU


« La préfecture de police et la justice nous ont répondu qu’elles craignaient d’être débordées si la majorité des victimes se mettaient à porter plainte », continue l’urgentiste. Aujourd’hui, seuls 11 % des viols ou tentatives font l’objet d’une plainte. Alors : « il s’agit surtout d’une ambition politique. Il faut changer le regard de la société. Je ne vois pas pourquoi on a réussi à faire un réseau infarctus et pas pour les femmes victimes de violence. Justice, police, soignants et associations de victimes doivent travailler ensemble. » Le 25 novembre, Marisol Touraine et Pascale Boistard, la secrétaire d’État aux Droits des femmes, devraient annoncer des mesures. « Qu’on ne nous dise pas que ce n’est pas faisable. Il y en a marre de la double peine pour ces femmes », prévient Patrick Pelloux.


Pia de Quatrebarbes, Vendredi, 21 Novembre, 2014

http://www.humanite.fr/contre-les-violences-faites-aux-femmes-lurgence-de-mobiliser-les-medecins-558321

Dispositifs médicaux : un reste à charge excessif pour les patients

Trop chers et mal remboursés… Les prothèses auditives, fauteuils roulants et autres implants médicaux ont coûté plus de 7 milliards 
aux personnes concernées, selon une étude d’associations de consommateurs qui appellent à une régulation du marché.


Quelque 7,3 milliards d’euros. C’est le montant des restes à charge, après remboursement de la Sécurité sociale et de leur éventuelle complémentaire santé, pour la seule année 2013, des usagers de dispositifs médicaux, ces produits et prestations utilisés pour compenser une maladie, blessure ou handicap (prothèses auditives, fauteuils roulants, lentilles de contact, appareils respiratoires, etc.). Selon une étude présentée hier par l’Observatoire citoyen des restes à charge en santé – créé par le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), le magazine 60 Millions de consommateurs et la société Santéclair (filiale de plusieurs complémentaires santé) –, ces produits et prestations ont coûté 13 milliards d’euros l’année dernière. Sur ce total, 5,7 milliards seulement ont été remboursés par l’assurance maladie. « C’est profondément choquant », réagit Arnaud Faucon, secrétaire national de l’Indecosa (association de consommateurs) CGT, qui constate « une tendance lourde ». « Les restes à charge se généralisent aux petits dispositifs, comme les bandelettes de mesures de glycémie destinées aux diabétiques, dont le nombre pris en charge est aujourd’hui limité. C’est choquant car on ne choisit pas sa maladie ou son infirmité. »
« Le même produit peut être 
vendu quatre fois plus cher »

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 ZIR / SIGNATURES


Outre l’ampleur de ces sommes, l’Observatoire dénonce « les nombreux dysfonctionnements dans la prise en charge » de ces dispositifs médicaux et notamment les « profondes inégalités » entre les produits. « Si les appareils dédiés à l’apnée du sommeil sont pris en charge à 74 % par l’assurance maladie, les audioprothèses ne le sont qu’à hauteur de 9 % pour les plus de 20 ans », note l’étude. Dénonçant des pratiques tarifaires « choquantes », elle relève qu’en l’absence de prix limite de vente, « le même produit peut être vendu quatre fois plus cher », selon les endroits. Qui plus est, les restes à charge varient en fonction de l’âge du patient ou du niveau de technicité de certains produits. Ainsi, pour les audioprothèses (appareils auditifs), le reste à charge moyen s’élève à 981 euros pour les moins de 20 ans et de 2 284 euros au-delà de cet âge. Ce que confirme Michel, qui souffre d’une surdité sévère. « Tout dépend du taux de surdité. Plus on est malentendant, plus l’appareil est sophistiqué et donc coûteux. Ce qui est mon cas. Il faut compter entre 2 500 et 3 000 euros par appareil. Ce qui fait 5 000 à 6 000 euros pour les deux oreilles. Personnellement, pour faire des économies, j’ai fait le choix de n’appareiller qu’une oreille », témoigne ce cinquantenaire. En effet, la Sécurité sociale ne rembourse que 60 % de 199,71 euros, soit 119,83 euros par appareil, quel que soit le coût de ce dernier. Une nomenclature qui n’a pas bougé depuis dix ans… Quant aux mutuelles, elles remboursent au mieux 50 % du prix de l’appareil. Dans le cas de Michel, sa mutuelle lui a remboursé 500 euros. « Quand on est salarié et reconnu travailleur handicapé, poursuit-il, on peut bénéficier d’une aide supplémentaire, soit de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées, soit de la Maison du handicap. Moi, ça m’a permis de ne mettre de ma poche que 30 % du prix total. On comprend aisément que certains fassent le choix de ne pas s’appareiller, d’autant que la durée de vie d’une prothèse auditive n’excède pas quatre ou cinq ans. » Selon l’étude, seuls 20 % des déficients auditifs sont en effet appareillés. L’Observatoire des restes à charge s’est aussi penché sur le cas des fauteuils roulants. Plus ils sont sophistiqués, moins bien ils sont remboursés. Pour un fauteuil électrique de 23 000 euros, l’assuré paye ainsi de sa poche 1 850 euros en moyenne, et plus de 6 000 euros dans 10 % des cas. « Les batteries des fauteuils électriques sont les mêmes que celles des Fenwick (chariots de manutention). Mais elles sont vendues dix fois plus chères. Ce n’est pas normal », déplore ­Christian Saout, secrétaire général du Ciss, qui milite pour que « le législateur modifie les règles de fixation des prix » et « tienne compte du prix réel de fabrication et non pas du retour sur investissement du fabricant ». Pour lui, « des prix limites de ventes permettraient la régulation ». Et de conclure : « Un reste à charge de 1 000 euros, c’est la retraite moyenne d’une femme. On se retrouve, soixante-dix ans après la création de la Sécu, avec des inégalités de remboursement alors qu’on a cotisé toute sa vie. »

Alexandra Chaignon, L'Humanité, Vendredi, 21 Novembre 2014 : http://www.humanite.fr/dispositifs-medicaux-un-reste-charge-excessif-pour-les-patients-558282

Violences faites aux femmes : un fléau qui persiste en France

Une femme décède tous les trois jours sous les coups de son compagnon en France. La violence à l'égard des femmes reste un fléau, avec des milliers de victimes, des taux de plaintes encore très bas et de lourdes conséquences sociale


À la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes mardi 25 novembre, le gouvernement rappelle que chaque année plus de 216.000 femmes sont victimes de violences commises par leur partenaire. Seules 16% déposent plainte. En outre, 86.000 femmes rapportent avoir été victimes de viol ou de tentative de viol. Seulement 10% d’entre elles déposent plainte, selon le ministère des Affaires sociales et des Droits des femmes.
En dehors des conséquences psychologiques et sociales, ce phénomène a un coût économique, évalué par le ministère à 3,6 milliards d’euros par an, en termes d’aides sociales, de soins et surtout de perte de capacité de production.
« Volonté politique trop faible »
« En France, l’arsenal législatif n’est pas mauvais mais c’est la volonté politique qui est trop faible », déplore Caroline De Haas, l’une des fondatrices de «Osez le féminisme !». Il y a un an, le gouvernement s’est pourtant engagé à faire de la lutte contre ce fléau une « priorité ».
Le 4e plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes (2014-2016) prévoyait ainsi la généralisation du téléphone « grand danger » », le développement de dispositifs pour faciliter les dépôts de plainte ou la formation des professionnels à la gestion des violences intrafamiliales. Y figurent aussi un meilleur accueil des femmes étrangères fuyant des violences et la création de 1.650 solutions supplémentaires pour garantir l’accès à un hébergement d’urgence d’ici 2017.
À l’adresse des hommes violents, il existe désormais des stages de responsabilisation pour prévenir la récidive.

Illettrisme : « Quand j’ai commencé à A, je me suis dit que Z était loin »

En France, 7% des 18-65 ans sont illettrés. Ils sont allés à l'école mais ont décroché puis peu à peu oublié ce qu'ils avaient appris.


« Quand j’ai commencé à la lettre A, je me suis dit « la lettre Z est vachement loin, est-ce que j’y arriverai? » » : Gérard Louviot revient de loin. Illettré, comme certains ex-salariés des abattoirs Gad ainsi qualifiés par Emmanuel Macron, ce Breton de 46 ans a appris à lire et écrire il y a seulement dix ans. « Orphelin des mots », le titre du livre qu’il vient de publier avec l’aide d’une journaliste  chez XO, M. Louviot lui aussi ouvrier, n’a guère connu qu’une suite d’humiliations et d’échecs, partagés par les 2,5 millions de personnes illettrées recensées en 2013 par l’Insee en métropole.
Comment un chiffre aussi élevé, 7% des 18-65 ans, est-il possible dans une France championne du prix Nobel de littérature avec quinze lauréats, et qui se flatte de son taux record de 87,9% d’admis au baccalauréat en juin dernier?
Gérard Louviot, marié et père de cinq enfants, ne se pose pas la question. Il n’a connu que la honte : « Je le cachais tout le temps. » « J’étais incapable de faire un chèque, de m’orienter, de comprendre une consigne [...] j’étais paralysé, tétanisé par la peur », dit-il à l’AFP dans le salon de sa maison de Plougonven, près de Morlaix.

L'homme qui " répare les femmes "

L'obstétricien Denis Mukwege soigne depuis quinze ans les victimes de viols en République démocratique du Congo



les ne savent pas si elles doivent continuer à vivre. Le corps en souffrance, elles ne se sentent plus femmes et vivent avec la peur au ventre. Adolescentes, jeunes mères, parfois grands-mères, elles ont été violées par des militaires. Dans ce coin de la République démocratique du Congo, au Sud-Kivu – une région riche et convoitée où des groupes armés s'affrontent depuis vingt ans –, " les femmes sont les premières victimes et leurs vagins sont devenus des champs de bataille ", dit une voix off, en introduction de Congo, un médecin pour sauver les femmes.
Un documentaire qui met en lumière le travail remarquable de Denis Mukwege, 59 ans, pressenti deux fois pour le prix Nobel de la paix et récompensé par le prix Sakharov pour la liberté de pensée 2014.
Perte d'identité
En  1999, en pleine guerre civile, ce chirurgien-gynécologue ouvre l'hôpital Panzi à Bukavu, sa ville natale, pour permettre aux futures mères d'accoucher sereinement. Mais sa première patiente n'attend pas un enfant : elle a été victime d'un viol. Cette année-là, il soignera 45 femmes qui ont été sexuellement agressées. Trois fois plus l'année suivante.

Lire la suite Le Monde 25/11/2014

1 million de bénéficiaires

A l'occasion du lancement de leur 30e campagne hivernale, lundi 24  novembre, les Restos du cœur ont annoncé qu'ils s'attendaient à devoir venir en aide à plus de 1  million de personnes. Ce chiffre record avait déjà été atteint en  2013. Les 2 090 centres des Restos vont ouvrir quotidiennement ou plusieurs fois par semaine selon les villes et distribuer des denrées aux familles en difficulté jusqu'en mars. – (AFP.)

Le Monde du 25/11/2014.


A Paris, la pollution équivaut à du tabagisme passif

Pour la première fois, les particules ultra fines dans l'air, les plus nombreuses et nocives, ont été mesurées


L'imOMSage fait frémir : le 13  décembre  2013, les rues de Paris étaient aussi polluées qu'une pièce de 20  m2 occupée par huit fumeurs. La capitale subissait alors un épisode de pollution extrêmement dense, dû au trafic routier, au chauffage au bois et aux activités industrielles. A 18  heures, le ciel était chargé de 6  millions de particules très fines par litre d'air, 30 fois plus que la normale. L'atmosphère pour un Parisien était assimilable à du tabagisme passif.
Ces données inédites, rendues publiques lundi 24  novembre, ont pu être établies grâce au ballon de Paris, installé au-dessus du parc André-Citroën, dans le 15e  arrondissement, et équipé depuis dix-huit mois d'un appareil laser, mis au point par le CNRS, capable de mesurer en continu les nanoparticules présentes dans l'air. Ces particules ultra-fines, dont le diamètre est inférieur à 0,1 micromètre (µm), sont extrêmement nocives pour la santé humaine, car elles pénètrent profondément dans les poumons, entrent dans la circulation sanguine et peuvent atteindre les vaisseaux du cœur.
Sept millions de décès


Les jouets ont-ils un sexe ?

L’industrie du jouet propose aux plus jeunes un monde fait de rose et de bleu. Elle semble ainsi faire le lit de stéréotypes éculés. 
Problème : les enfants en redemandent…
Des petits garçons jouant à la poupée ou à la dînette, des petites filles avec une grue ou une voiture télécommandée… À l’approche de Noël 2012, le catalogue de jouets édité par les supermarchés Super U détonnait : il était « non sexué ». Il n’en fallait pas plus pour que les réseaux sociaux et les médias s’embrasent : d’un côté, on se félicitait qu’une enseigne rompe enfin avec les stéréotypes. De l’autre, on dénonçait une « propagande » en faveur de la « théorie du genre ».


Fin de vie : mourir vraiment dans la dignité

Le suicide d'un octogénaire qui a tué son épouse atteinte d'un cancer incurable relance le débat sur l'euthanasie. Pour Damien Le Guay, auteur du Fin mot de la vie, contre le mal mourir en France, l'urgence n'est pas de légiférer sur la mort mais de remettre le malade au cœur de l'hôpital.


Un homme de 84 ans s'est donné la mort ce dimanche à l'hôpital Ambroise Paré de Boulogne-Billancourt. Juste avant, il a tué d'une balle son épouse hospitalisée pour un cancer incurable. Les partisans de l'euthanasie demandent une loi pour «éviter ce genre de drames». Que pensez-vous de ce «droit à mourir dans la dignité» qu'ils invoquent? 
 
Damien LE GUAY: Il faut toujours remettre en cause l'idée selon laquelle il y aurait d'un côté une mort «digne», celle, choisie, de l'euthanasie, et, de l'autre une mort indigne, car «subie». Il faut contester à l'ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité) la «dignité» qu'ils revendiquent et qu'ils confisquent au détriment des autres. Il y a des dignités différentes, voilà tout. Le droit à mourir dans la dignité est mis en œuvre jour après jour par les innombrables bénévoles en soins palliatifs bien plus que par l'ADMD.
Un constat s'impose: aujourd'hui, on meurt mal en France. Certains avancent une solution: ne pas appliquer la loi Léonetti, ne pas améliorer les soins palliatifs et légaliser l'euthanasie. Or, la légalisation de l'euthanasie serait un mal pire que les maux qu'elle prétend résoudre. 

Crédits photo : Eric Baudet/Divergence

Pourquoi? N'est-elle pas simplement l'expression d'une «ultime liberté»? 

Il y a deux euthanasies. D'une part l'euthanasie-liberté qui est celle, par exemple, d'André Comte-Sponville. Il pense l'euthanasie dans le prolongement du suicide avec la noblesse d'une «ultime liberté» face à toutes les contraintes, les lassitudes. Il est possible de discuter de ces motivations - acceptables jusqu'à un certain point. D'autre part: l'euthanasie économique. Plus sordide, moins avouable. Il y a un an un vice-premier ministre japonais (avant de faire machine arrière) avait fait le constat que 50% des dépenses de santé de son pays intervenaient dans les dernières semaines de la vie. Ce qui est vrai au Japon l'est aussi en France. Il avait suggéré que, par devoir civique, les japonais «devraient» avancer de quelques semaines leur mort. Ainsi l'Etat ferait de considérables économies. Les deux euthanasies sont distinctes et en même temps, la seconde n'est pas loin de la première. Les coûts de la santé sont collectifs. Une pression sociale existe, implicitement. La dérive est possible. Et ceux qui, sans le dire, veulent diminuer les dépenses de santé par une «économie» de quelques semaines sur la durée de vie, font des partisans de l'euthanasie-liberté des «idiots utiles» de ce débat.

96% des Français se disent favorables à l'euthanasie. Peut-il y avoir encore débat avec de tels sondages ?

Oui. Encore faut-il savoir pourquoi les Français veulent l'euthanasie? Avant tout, ils craignent l'hôpital! Ils n'ont pas envie de mourir seuls, abandonnés, face à des machines, réduits à leurs maladies et incapables de comprendre la logique toute puissante des médecins. Ils savent qu'ils vont perdre leur autonomie physique mais surtout leur autonomie de décision. Ils ne seront plus maîtres du jeu. N'auront plus leur mot à dire. De guerre lasse, ils préfèrent «l'euthanasie» sans savoir qu'ils réclament bien des droits qui sont déjà acquis. Quand on demande aux Français s'ils ont le droit de demander l'interruption des soins, ils répondent non! Alors que c'est le cas depuis la loi de 2002! Toute cette ignorance et cette peur se convertissent en une revendication indistincte et incertaine de rejet de l'hôpital plus que d'adhésion à l'euthanasie. Ne faudrait-il pas améliorer «l'offre palliative», la place centrale de l'humain, l'écoute, l'humanité des relations, la modestie du curatif! C'est une question de volonté politique. Avant de se poser la question de l'euthanasie, posons-nous d'abord la question du confort, de l'accompagnement, des conditions de la mort en France. Il y a tant et tant à faire !



Lire la suite de l'article sur le site internet du Figaro :  http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2014/11/24/31003-20141124ARTFIG00081-fin-de-vie-mourir-vraiment-dans-la-dignite.php

dimanche 23 novembre 2014

Infographie. L’avortement, un droit à défendre

En France, le droit à l’avortement dans les meilleures conditions possibles est très menacé. Les centres pratiquant l’IVG qui ferment sont dramatiquement nombreux, le secteur privé se désengage, jugeant l’activité peu rentable, et de plus en plus de femmes ne peuvent plus choisir leur méthode d’avortement.

Photo AFP

Consulter l'infographie dans sa globalité : http://www.humanite.fr/infographie-lavortement-un-droit-defendre-558325

Les urgences : le fossé entre les chiffres et la réalité

Alors que la Drees présentait mardi 18 novembre les premiers résultats d'une enquête nationale sur la situation dans les services d'urgences, les médecins urgentistes de l'hôpital de Carcassonne (Aude) se préparent à rentrer en grève. Installés dans un nouveau bâtiment depuis six mois, leur activité a bondi de 25 % mais les moyens humains n'ont pas suivi.


La dernière étude nationale sur les services d'urgences datait de 2002. Hier, la Drees (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques) a rendu public les premier résultats d'une enquête réalisée le 11 juin 2013 auprès de l'ensemble des structures hospitalières d'urgence. Contrairement à la première étude qui ne portait que sur 150 services, celle-ci a pris en compte l'ensemble des structures hospitalières d'urgences (publiques et privées) soit 736 points d'accueil d'urgence. « L'objectif était de décrire la diversité des organisations et des fonctionnements de ces structures (comportement des patients, délais de prise en charge, difficultés éventuelles rencontrées par les équipes), expose Gwennaëlle Brilhault, de la Drees. Et de poursuivre: Depuis 2002, la situation a évolué, notamment du point de vue réglementaire (temps de travail des médecins, loi HPST, financements) et ce, dans un contexte de recours toujours croissant aux urgences. » De fait, on dénombrait 18,7 millions de passages aux urgences en 2012, contre 12,7 millions en 2000. Une hausse à l'origine de nombreux problèmes dans les services d'urgences ces dernières années (délais d'attente qui explosent, insuffisance de personnel, etc.).


On apprend ainsi que 78 % des services d'urgences dépendent d'un établissement public, 6 % du privé non lucratif et 16 % du privé à but lucratif. « Il y a au moins un point d'accueil par département. Dans les dix départements les mieux dotés, on est à 14 points d'accueil contre deux dans les dix moins bien équipés. Ainsi, l'Orne et l'Yonne sont pourvus de 2,4 points d'accueil pour 100 000 habitants », présente Layla Ricroch, de la Drees. Côté effectif, l'enquête montre qu'il y a entre « trois et quatre fois plus d'ETP (équivalent temps plein) dans les services qui accueillent plus de 40 patients par jour ». C'est aussi dans ces établissements, essentiellement des CHU, que l'équipement est le plus complet (scanner, IRM, plateau technique, biologie etc.). Selon la Drees, les délais d'attente semblent plutôt bons. « Les patients sont évalués rapidement, estime le Dr Albert Vuagnat, conseiller médical au bureau des établissements de santé, à la Drees, évoquant une « médiane de 4 minutes après l'enregistrement. La prise en charge et l'administration des soins interviennent en moyenne 30 minutes après l'arrivée », énumère le médecin, rappelant que « la SFMU (Société française de médecine d'urgence) recommande que le délai avant évaluation ne dépasse par 30 minutes ». Cependant, il reconnait une « hausse de l'attente » durant les heures les « plus encombrées » (après-midi et soirée), délai qui varie aussi « selon les effectifs ». Un doux euphémisme... D'autant que cette étude tombe alors que, comme chaque année, des services d'urgence sont à l'agonie. 


Photo Martin Bureau/AFP

 Après les urgences du CHU de Limoges, où il y a quelques jours, plusieurs médecins ont démissionné de leurs fonctions administratives, c'est au tour des urgentistes de l'hôpital de Carcassonne de tirer la sonnette d'alarme. « L'accueil aux urgences se fait avec trois médecins, dont deux dédiés au Smur, alors que l'activité a augmenté de 25 % sur les six derniers mois. Quand ils sortent tous les deux de façon concomitante, ce qui arrive tous les jours, l'autre médecin reste seul. C'était inconfortable avant, c'est devenu insécuritaire. Les équipes sont épuisées, en burn-out, incapables de faire leur travail. Nous mettons les patients en danger et nous aussi », dénonce le docteur Elodie Paul, déléguée régionale de l'Amuf (Association des médecins urgentistes de France). L'équipe médicale réclame une ligne médicale de garde supplémentaire, soit 2,5 ETP supplémentaire. « Pour assurer le renfort d'un médecin à 12 heures au quotidien, il faut deux médecins et demi », explique Elodie Paul.
Faute de réponse satisfaisante, les urgentistes, soutenus par les syndicats de personnels, sont en grève à partir de ce mercredi 19 novembre. Ils savent qu'ils sont d'ores et déjà tous assignés. « C'est bien la preuve que nous sommes en effectif minimal, lâche le docteur Paul, qui espère beaucoup de ce mouvement. « C'est notre seul moyen pour sortir de cette crise et recentrer notre activité sur les soins. »


Alexandra Chaignon, L'Humanité du 18 novembre 2014.

Une prime au rabais pour les salariés pauvres

Le gouvernement a annoncé, mardi soir, la mise en place d’une prime d’activité en complément des petits salaires, enterrant la prime pour l’emploi et augurant d’une baisse des aides pour les plus modestes.


Deux ans de tergiversations pour une régression. Mardi soir, Matignon a annoncé la mise en place d’une prime d’activité censée remplacer la prime pour l’emploi (PPE) et le RSA activité d’ici à janvier 2016. La fin de la PPE, crédit d’impôt perçu par 5,3 millions de travailleurs modestes, avait déjà été actée la semaine dernière dans le projet de loi de finances rectificative. Le gouvernement estimant que cette mesure mise en place par Lionel Jospin en 2001 était insuffisamment ciblée, voire « versée à des ménages aisés », d’après Matignon. Quant au RSA activité, complément de revenu pour les salariés avec de petits contrats, il n’a jamais décollé, souffrant d’un taux de non-recours de 68 %.

Le flou entoure cette prime. On ne connaît pas le revenu nécessaire pour en bénéficier, a priori autour du Smic. Nouveauté, elle pourrait être demandée par les personnes de moins de 25 ans. La situation des bénéficiaires serait étudiée tous les trois mois, contre tous les mois aujourd’hui pour le RSA activité. Valls a vanté la simplicité de cette nouvelle prime, pour « rendre plus efficace le soutien aux salariés aux revenus les plus modestes ». Mais, comme l’explique François Rebsamen, ministre du Travail, toujours prompt à stigmatiser la fainéantise des chômeurs, elle va contribuer à « une plus grande incitation à reprendre un emploi ».
Des mesures qui pèsent peu 
dans la balance

Des déclarations destinées à masquer les économies que le gouvernement va engranger sur le dos des plus précaires. Si le premier ministre claironne que les moins de 25 ans auront accès au dispositif, les autres salariés pauvres vont automatiquement y perdre. Car cette réforme va se faire à coût constant, en prenant en compte les 2 milliards d’enveloppe du RSA activité et le 1,94 milliard résultant de la suppression de la PPE, soit 4 milliards au total. Le gouvernement présente la prime comme un coup de pouce pour les ménages, en complément de la baisse d’impôts sur le revenu, mais ces mesures, chiffrées à 5 milliards, pèsent peu dans la balance au regard des 40 milliards d’euros de baisse des prélèvements pour les entreprises. Favorable à une fusion de la PPE et du RSA activité, Florent Gueguen, directeur général de Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars), est un peu inquiet. « Il serait impensable que le gouvernement mette en place un dispositif faisant des perdants parmi les travailleurs pauvres, mais il est impossible de faire cette réforme à budget constant. Par exemple, si le point d’entrée dans l’aide se situe autour de 0,3 fois le Smic, il faudra un tiers-temps pour recevoir cette prime, alors que cela n’était pas nécessaire pour percevoir le RSA activité. Pour nous, un système de versement dès la première heure travaillée aurait été la meilleure solution. » Cette prime serait octroyée à la personne travaillant, ce qui risque d’engendrer un autre problème. Comme l’explique Florent Gueguen, « c’est une prestation individuelle, qui ne prendrait pas en compte les enfants et le conjoint. Les familles nombreuses ou monoparentales toucheraient moins qu’avec le RSA activité ! ». Le Mouvement des jeunes socialistes salue une avancée, mais n’est pas tout à fait rassuré, craignant « qu’une prime d’activité d’un montant inférieur pourrait être mise en œuvre pour les jeunes ». Manuel Valls donnera plus de détails aujourd’hui en Conseil des ministres. Mais les plus modestes sont déjà assurés d’être perdants.



Cécile Rousseau, L'Humanité du 20 novembre 2014.


Les 211000 plus riches possèdent 13% de la richesse mondiale

Une nouvelle étude confirme que les ultra-riches concentrent de plus en plus de richesses. Malgré la crise, leur nombre augmente, et leur richesse encore plus.


Cette étude de WealthX et de la banque UBS recense les très riches qui ont amassés plus de 30 millions de dollars. Ils sont 211000, soit une augmentation de 6 % sur un an, et leur patrimoine cumulé a lui augmenté de 7 %. Ainsi possèdent -ils à eux seuls 13 % de la richesse mondiale.
Ils sont de mieux en mieux répartis dans le monde, même si les Etats-Unis abritent toujours le plus gros contingent d'ultra-riches, suivis de l'Europe et de l'Asie. Le continent africain reste en dernière place, avec 3005 ultra-riche, mais c'est là que l'augmentation est la plus forte, avec une augmentation de 8,3 %.

La richesse cumulée de ces 211000 ultra-riches atteint les 30.000 milliards de dollars. C'est quasiment le PIB cumulé de l'Europe et des Etats-Unis. Presque la moitié du PIB mondial. C'est 3 fois le montant de toutes les dettes souveraines cumulées des pays européens. L'augmentation de cette richesse se fait principalement sur les marchés financiers, repartis comme s'il n'y avait jamais eu de crise. Toutefois, un tiers de ces ultra-riches ont hérité du gros de leur fortune.  Au niveau mondial, ce club est à une écrasante majorité (87%) composé d'hommes dont l'âge moyen est de 59 ans.


AFP


Lire l'article : http://www.humanite.fr/les-211000-plus-riches-possedent-13-de-la-richesse-mondiale-558341

lundi 17 novembre 2014

Protection sociale. Le scandale des 9,9 milliards d’euros non distribués



Dans l'Humanité Dimanche. Haro sur les tricheurs qui profiteraient du RSA, des allocations chômage ou de la couverture médicale universelle. La chasse aux fraudeurs est devenue un refrain que le gouvernement entonne à son tour. La réalité est bien différente : c’est celle du non-recours aux prestations sociales, du découragement après des mois de démarches et de regards suspicieux. Tandis que l’État économise près de 10 milliards d’euros et que la fraude est marginale, le risque d’exclusion est bien plus prononcé.


Assistés, profiteurs, fraudeurs… Depuis le quinquennat Sarkozy, le vocabulaire qualifiant les candidats à l’aide sociale s’est copieusement fleuri. Le premier ministre, Manuel Valls, lui aussi en chasse contre les abus qui grèvent les budgets sociaux, a rappelé, dans le sillage des déclarations de son collègue de Bercy, Emmanuel Macron, qu’il comptait bien mener la bataille sur le même terrain. Ces priorités politiques, nourries par une logique comptable et répressive, masquent un fléau de taille qui pèse bien plus lourd que la fraude : celui du non-recours aux aides sociales par les personnes qui y ont droit, enfermant ces dernières dans une exclu sion parfois sans retour. Le livre blanc « Discrimination et Pauvreté » du mouvement ATD Quart Monde, paru en octobre 2013, souligne que, chaque année, 5,2 milliards d’euros de RSA (revenu de solidarité active) ne sont pas versés à leurs destinataires. « En comparaison de cette non-dépense publique, la fraude au RSA représente 60 millions d’euros par an. On est proche du rapport de 1 à 100 », mentionne Bert Luyts, délégué national d’ATD Quart Monde France. « Il y a de quoi être surpris. Mais ces données sont confirmées par plusieurs études. On peut donc considérer qu’elles sont fiables et représentatives de la réalité. De manière générale, sur la question du non-recours aux prestations, les chiffres sont beaucoup plus élevés que ce qu’on pourrait imaginer », confie Pierre Mazet, chargé d’études à l’Odenore (Observatoire des nonrecours aux droits et services). Même son de cloche pour la CMU (couverture maladie universelle) qui assure aux plus démunis un accès gratuit aux soins. Un ayant droit sur 4 n’en dispose pas, constate l’Observatoire des inégalités, c’est-à-dire 1,5 million de personnes. Le taux de nonrecours atteint 60 % dans le cas de l’AME (aide médicale d’État), qui permet aux étrangers en situation irrégulière de se soigner. « Et que dire des tarifs préférentiels de l’énergie ? Là encore, on constate que le non-recours par les personnes les plus démunies est très fréquent, souvent par ignorance ou méconnaissance des démarches », regrette Bernard Schricke, directeur de l’Action France et Europe du Secours catholique.




Photo : François Guillot/AFP
Photo François Guillot/ AFP
RENOUVELER SON DOSSIER : UNE ÉPREUVE

Janine Delmotte a droit à la CMU depuis plus de 6 mois, mais elle refuse de s’inscrire. Après des échanges répétés avec différents guichets d’aide sociale, elle jette l’éponge. « On dit que la crise est de notre faute, on nous montre du doigt. J’en ai assez d’être humiliée, je ne veux plus rencontrer toutes ces personnes. Je ne vais plus non plus chercher les colis alimentaires auxquels j’ai droit », témoignet- elle. « Entendre des accusations disant que nous sommes des profi- teurs dès lors qu’on touche une aide sociale est malheureusement fréquent », s’attriste Richard Petit, sans domicile et ancien bénéficiaire du RSA pendant plusieurs années. Une réalité amère qui n’est pas rare et qui, selon Bert Luyts, est « clairement alimentée par les suspicions croissantes de fraude qui contribuent à se murer dans le silence. Les préjugés font le lit des discriminations ». Pour Rachel Mimouni, le renouvellement de la CMU tourne à l’épreuve de force : « On m’a d’abord expliqué que je n’y ai plus droit en raison de mes ressources, alors que je n’ai pas de travail et plus d’allocations chômage. Je ne saisissais pas.

En retournant à la CPAM, j’ai été reçue avec un total mépris. La personne a violemment jeté tous les documents que j’ai ramenés qui n’étaient pas indispensables en m’expliquant que je ne comprenais vraiment rien. Je suis partie en pleurs. » Avec le soutien du Secours populaire, la jeune femme comprend l’imbroglio administratif qui malmène son dossier : la CPAM prend comme unique document de référence son avis d’imposition concernant les revenus de l’année 2013 où elle a travaillé. « À part l’aide au logement, je vis avec une pension alimentaire de 200?euros par mois. L’hiver approche. Sans la CMU, j’ai peur de ne plus pouvoir faire soigner mon enfant », craint Rachel Mimouni.

DES MOIS ET DES MOIS D’ATTENTE

Richard Petit est lui aussi victime de dysfonctionnements dans le traitement des dossiers. « Voilà plus d’un an que je ne reçois plus le RSA sans raison. À la CAF où je suis inscrit, personne n’a su me donner d’explications. Après plusieurs mois d’attente, on m’a demandé de refaire un nouveau dossier pour percevoir l’aide, ce que j’ai fait. Le problème est qu’il faut désormais patienter 4 mois supplémentaires pour percevoir le RSA. J’espère que la situation va changer. Avec l’arrêt inexpliqué des versements, c’est la grande majorité de mes revenus qui ont disparu », confie-t-il. Même lorsque les procédures auxquelles sont soumises les demandes se déroulent sans heurt, les délais compliquent les situations. « Ils sont de plus en plus longs », s’inquiète Mireille, une bénévole du Secours populaire qui aide les ayants droit à recouvrir leur dû. « Il n’y a pas si longtemps, il fallait attendre 2 mois pour que les étrangers puissent obtenir l’AME. Aujourd’hui, c’est 3 mois dans le meilleur des cas, plutôt 5 mois en cas de difficultés ou pièces manquantes, ce qui est fréquent. Ce n’est pas étonnant. La tendance est à la fermeture des centres. Le personnel qui gère les demandes se réduit. »

UNE MONTAGNE DE PIÈCES À FOURNIR

À ces écueils viennent s’ajouter des problèmes structurels imputables aux politiques publiques. La domiciliation est indispensable pour percevoir des aides sociales. Les plus démunis peuvent en théorie se tourner vers les CCAS (centres communaux d’action sociale) lorsqu’ils n’ont pas d’autre choix. « Dans la pratique, ce service est très peu assuré par ces centres, alors que c’est leur devoir. Parfois, on domicilie une seule personne pour pouvoir dire qu’on fait de la domiciliation. Il n’y a aucun contrôle sur le terrain à ce sujet », s’indigne Bernard Schricke. En plus du manque d’information relatif aux droits, aux conditions d’éligibilité, les enquêtes sur les causes du non-recours pointent du doigt la complexité du système. « De nombreuses personnes sont confrontées au découragement en cours de démarche. Elles ne réussissent pas à fournir les documents nécessaires. Il peut ainsi se passer des mois avant qu’une aide financière soit perçue », constate Bert Luyts. L’Odenore a observé un rapport mécanique entre la nécessité de fournir des pièces nombreuses et variées et le non-recours. Pierre Mazet explique « qu’on développe du non-recours en compliquant les conditions d’accès. C’est un problème d’autant plus important qu’on remarque globalement une complexification croissante qui va à rebours des discours officiels sur la simplification administrative ». Il précise que « des études aux États- Unis ont montré que complexifier est un bon moyen de faire baisser la demande sociale ». De là à faire le lien avec un choix politique de laisser à l’écart ces populations, à l’heure où la réduction des dépenses est le maître mot, il n’y a qu’un pas.
 

UNE CHASSE AUX FRAUDEURS SÉLECTIVE

Malades, chômeurs, familles, précaires… fraudent peu (moins de 1 % des prestations versées) et renoncent même souvent à faire valoir leurs droits. Lors de l’examen de la loi de financement de la Sécurité sociale, un député UMP a pourtant fait adopter un amendement à l’unanimité des présents (39 seulement, il est vrai) instaurant l’échange automatique des données sur les prestations versées entre l’ensemble des organismes sociaux et le recoupement avec les données du fisc. Un flicage en règle ! Curieusement, la démarche épargne la fraude sociale patronale – le non-paiement des cotisations sociales – qui, selon la Cour des comptes, a doublé en 8 ans pour atteindre 20 à 25 milliards d’euros par an. Soit deux fois le déficit annuel de la Sécurité sociale. Quant à la fraude fiscale de 60 à 80 milliards d’euros de recettes perdues par an pour l’État, du fait essentiellement des ménages fortunés et des entreprises, le gouvernement affiche, certes, sa volonté d’y remédier, mais le bilan reste maigre.
 

50 % DES BÉNÉFICIAIRES POTENTIELS DU RSA N’Y ONT PAS RECOURS
 

Selon les prestations, le non-recours concerne de 10 à 90 % des populations d’ayants droit. L’OCDE estime que ce pourcentage varie de 20 à 40 % selon les pays. En France, il atteint 50 % pour le RSA, selon l’Odenore (1). Soit 35 % des ayants droit au RSA socle, destiné aux bénéficiaires exclus de tout emploi, et jusqu’à 68 % des ayants droit au RSA activité, qui s’adresse aux travailleurs percevant des revenus inférieurs à un minimum. Globalement, du fait du non-recours des ayants droit, 5,2 milliards d’euros ne sont pas versés au titre du RSA, et 4,7 milliards d’euros par les caisses d’allocations familiales. (1) Observatoire des non-recours aux droits et services.

Mathieu Neu, L'Humanité, 14 novembre 2014 : http://www.humanite.fr/protection-sociale-le-scandale-des-99-milliards-deuros-non-distribues-557688

Prud'hommes : l'OPA de Macron et Rebsamen sur la justice sociale

Bien qu'il soit question de justice, c'est bien le ministère du Travail qui, conjointement avec celui de l'Économie, annonce une reforme du fonctionnement de la justice prud'homale, disqualifiant les représentants des salariés à l'unique bénéfice de ceux qui bafouent le droit du travail.


La suppression des élections prudhommales par ordonnance et le projet de loi "Macron" visant, entre autres, à reformer le fonctionnement des prud'hommes en réduisant à peau de chagrin le rôle des représentants des salariés, constituent  une double attaque contre le droit du travail, directement inspirée par des préconisations patronales.




1 Suppression des élections

« Quand on veut tuer son chien, on l'accuse d'avoir la rage », s'exclame Jean-Pierre Gabriel, responsable du pôle droits, libertés et actions juridiques de la CGT, déplorant le récent vote par le  Sénat du projet de loi Rebsamen portant sur la désignation des conseillers prud’hommes et le report des mandats jusqu’à fin 2017.

Ce projet premier de loi, présenté en procédure accélérée, et que les députés sont invités à voter (ou pas !) le 20 novembre, prévoit notamment que le gouvernement puisse supprimer par ordonnance l’élection au suffrage universel des conseillers prud’hommes au profit d'une simple "désignation".

Une véritable « usine à gaz », complètement inapplicable, dénonce Jean-Pierre Gabriel qui explique qu’il sera « impossible de désigner concomitamment des représentant des salariés et des employeurs en ce basant sur une représentativité qui n’est pas la même, ni en terme de calendrier, ni en terme de géographie des circonscriptions ! Du même coup, les chômeurs ne seraient plus comptabilisés donc plus représentés ! »

Pour  Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail, il s’agit bel et bien d’un « déni de démocratie »

2  Le projet de loi Macron : désarmer les prudhommes pour « sécuriser » les patrons !

Le 15 décembre le conseil des ministres devrait valider le projet de loi Macron dont la partie concernant les prud’hommes est inspiré d’un rapport "à charge"  rendu en juillet par Alain Lacabarats, président de chambre à la Cour de cassation. (L'avenir des juridictions du travail : Vers un tribunal prud’homal du XXIème siècle, document à télécharger)

Christiane Taubira, la garde des sceaux, et François Rebsamen, le ministre du travail, ont évoqué cette « réorganisation des Prud’hommes »présenté le 6 novembre lors d’un déplacement à  Orléans. Le même jour, Le président du Medef avait appelé à « sécuriser juridiquement le CDI », jugeant que la crainte des patrons de « se trouver devant les prud'hommes s'ils rompent le contrat » était « un des principaux freins à l'embauche ».

Car derrière l’ambition affichée d’une « meilleure formation » des représentants des salariés aux conseils des prud’hommes, se cache une  « mise au pas » de la justice du travail marqué par « l’obsession du rendement et de l’évacuation des dossiers au prix d’une justice au rabais, rendue par un juge qui abdique le cœur même de sa mission » dénonce Patrick Henriot, du syndicat de la magistrature.

Si cette loi, dont l’Humanité s’est procuré un pré-projet (projet_de_loi.doc) était mise en application, alors c’est tout un pan de la justice sociale qui serait aboli, notamment avec un des article qui propose ni plus ni moins la mise en place d’un « barème de dommages et intérêts pour rupture abusive» , déniant de fait au juges l’appréciation au cas par cas le préjudice des salariés qui perdent brutalement et sans justification leur travail. Toute évaluation contextuelle  est ainsi évacuée et les employeurs savent d’avance ce qu’il leur en coutera d’enfreindre la loi. Les voici donc parfaitement sécurisés, n’ayant plus qu’à provisionner les sommes à payer pour avoir licencié abusivement des salariés !

En conséquence, les salariés n’auraient donc plus d’intérêt à aller devant les Prud’hommes et seraient incités à accepter des accords transactionnels…  « L’objectif est que de moins en moins de salariés aillent en justice pour demander réparation des préjudices qu’ils ont subi », déplore Gérard Filoche qui se fend d’un véritable plaidoyer pour le droit du travail :

Les Prudhommes, parent pauvre de la justice

Certes, cette justice des travailleurs fonctionne trop lentement et des délais interminables (jusqu'à 24 mois dans certaines circonscriptions) rendent trop souvent ses décisions caduques ou inapplicables. Mais si tous s'accorde sur ce constat qui a valu à l'Etat d'être condamné à de multiples reprise pour déni de justice, et sur le manque patent de moyens, les "remèdes" proposés par le gouvernement font bondir les syndicats. « Si tout le monde s’accorde sur le fait que le taux de participation des salariés aux dernières élections 2008 n’est pas satisfaisant et que la simplification de son organisation est nécessaire, le gouvernement ne peut pas y remédier en supprimant purement et simplement les élections ! », s’indigne le Jean-Pierre Gabriel

« Rendre les prudhommes plus efficaces passe en premier lieu par un accroissement des moyens qui leur sont alloués, précise Marc Dolez, député Front de Gauche, qui souligne que depuis 20 ans 50% des personnels de greffe ont été supprimés… »

De son coté, la CGT propose de rapprocher le vote aux élections prud’homales dans l’entreprise en lien avec les IRP, de simplifier les listes, de faciliter le vote des chômeurs, etc.


Eugénie Barbezat
Par Eugénie Barbezat, L'Humanité, le  10 novembre 2014.
Lire l'article en totalité : http://www.humanite.fr/prudhommes-lopa-de-macron-et-rebsamen-sur-la-justice-sociale-557170

dimanche 16 novembre 2014

Régénérer les cellules fabriquant de l'insuline pour vaincre le diabète

Ce vendredi 14 novembre était la Journée mondiale du diabète, une maladie qui touche environ 350 millions de personnes dans le monde. Dans cette vidéo d'Universcience, le chercheur français Patrick Collombat (Institut de biologie Valrose à Nice) présente les recherches de son équipe sur le diabète de type-1 (ou diabète insulino-dépendant), recherches qui ont été récompensées en juin par le prix Morgagni sur le métabolisme. Cette équipe a montré que, chez la souris, il était possible de régénérer les cellules fabriquant de l'insuline ayant été détruites par la maladie.



Vaincre le diabète par universcience-lemonde

Source : LeMonde.fr, le 14 novembre 2014.

Imprimer de la peau humaine ? C'est bientôt possible

Des chercheurs français sont en train de développer une technique pour fabriquer des tissus humains grâce à l'impression biologique en 3D par laser.


Produire des tissus humains sera bientôt possible grâce à une technique d'impression biologique en 3D par laser développée par des chercheurs français, avec des applications en cosmétique et en chirurgie, notamment dans le domaine des greffes.
Fabien Guillemot, de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), vient de créer avec un associé une société spécialisée dans la fabrication de tissus par bio-impression, Poietis, à Pessac, près de Bordeaux.
Les premières bases ont été jetées il y a 25 ans par un scientifique américain, Joseph Klebe, qui utilisait une simple imprimante à jet d'encre et une protéine présente dans le liquide extracellulaire, la fibronectine.

La bio-impression


Plusieurs projets de recherche ont suivi en Europe, aux Etats-Unis et au Japon pour limiter le rejet des implants par le corps humain, dont celui dirigé par Fabien Guillemot. Ce dernier travaillait sur le traitement laser des bio-matériaux pour faciliter leur intégration dans le corps quand il a découvert un nouveau champ d'expérimentation en abandonnant la méthode soustractive, qui consiste à enlever de la matière, au profit d'une technique additive, qui consiste à l'empiler.
"Progressivement, on s'est aperçu qu'il serait pertinent d'aller plus loin que le dépôt de principes actifs pour favoriser l'attachement des cellules, en travaillant sur le dépôt des cellules elles-mêmes", précise le chercheur bordelais.
Le projet s'est développé avec l'apport d'autres laboratoires. Objectif : trouver la bonne méthode permettant de d'empiler de façon ordonnée, à l'aide d'un laser, des cellules vivantes contenues dans du liquide.
Depuis 2010, il est entré dans une phase de développement des applications de la bio-impression.

Fabriquer des tissus vivants de grand volume


"On s'est intéressé aux tissus osseux et, plus récemment, à la peau et à la cornée, les deux tissus où il y a le plus de besoins" explique Fabien Guillemot.
Il reste beaucoup de chemin à faire. Un des obstacles à franchir est de comprendre comment fabriquer des tissus plus complexes et de les vasculariser.
Les chercheurs bordelais travaillent sur l'assemblage de cellules formant de petits vaisseaux sanguins, les capillaires. Lorsque cette technique sera maîtrisée, il sera alors possible de fabriquer des tissus vivants de grand volume.
Ce sont des tissus relativement fins qui se prêtent assez bien à la bio-impression, contrairement aux tissus osseux demandeurs de plus grandes quantités de matière bio-imprimée, ce qu'on n'est pas capable de faire aujourd'hui."

Révolutionner les greffes


Reste aussi à maîtriser l'évolution des cellules imprimées. "Avec le même patrimoine génétique, les cellules vont évoluer en fonction de leur environnement. Et plus on va anticiper l'évolution de cet environnement, plus on sera en mesure de fabriquer des structures complexes et de passer à des applications concrètes", explique Fabien Guillemot.
Les industries pharmaceutiques et cosmétiques sont très intéressées : l'"impression" de tissus vivants leur permettra de tester de nouvelles molécules et de nouveaux médicaments sans passer par des essais sur des animaux et des cultures de cellules et donc de gagner beaucoup de temps. 
"A plus long terme, disons dix ans, nous visons le marché clinique avec la greffe chirurgicale", dit Fabien Guillemot.
Le traitement des grands brûlés pourrait en être à terme considérablement amélioré.
Mais si des chercheurs imaginent déjà pouvoir fabriquer des organes humains, Fabien Guillemot reste très prudent. "A ce jour, même si on peut toujours imaginer que ça se fera un jour, on ne sait absolument pas comment. La bio-impression d'organes c'est un peu de la science-fiction", concède-t-il.

Article publié sur le site internet du Nouvel Observateur, le 15 novembre 2014.

Visite guidée dans le QG de la guerre anti-Ebola

Ici, pas de combinaison étanche ni de masque de protection. Au siège de l'Organisation mondiale de la santé, à Genève, c'est avec des études épidémiologiques, des courbes et des analyses que se mène la lutte contre la fièvre hémorragique. Médecins, statisticiens, anthropologues... suivent en temps réel la progression du virus. Et coordonnent la riposte. La coordination, c'est justement ce qui a manqué au sein de l'OMS au début de l'épidémie, lui laissant le temps d'exploser. Une erreur que l'institution tente aujourd'hui de rattraper.

 

Le siège de l'OMS à Genève.
Le siège de l'OMS à Genève. | M Le magazine du Monde


C'est là, dans un petit bureau de rien du tout, perdu dans un couloir sans âme de l'un des dix bâtiments du siège de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à Genève, que le Dr Pierre Formenty conserve ses cahiers rouges. Vingt-deux en tout. Tous consacrés au virus Ebola, dont cinq noircis de notes sur l'épidémie qui frappe cette année l'Afrique de l'Ouest et a déjà fait environ 5 000 morts. C'est là, depuis le 14 mars, date du premier courriel reçu des équipes de l'OMS en Guinée révélant un cas « suspect », qu'il a consigné jour après jour ses interrogations, puis ses certitudes. Là qu'il a écrit pour la première fois « Ebola ? ». Avant de noter, quelques pages plus loin « Ebola ». C'était le 21 mars. Un mois plus tard, il s'envolait pour Conakry avant de se rendre à Guéckédou, à la frontière de la Sierra Leone et du Liberia, où il a enquêté pendant trois semaines sur les premiers cas avérés et la chaîne de transmission.
A 54 ans, le docteur Formenty est le « Monsieur virus Ebola » de l'OMS. « Un maniaque », selon ses collègues, qui passe des heures à travailler chaque mot et chaque dessin des documents qu'il envoie aux personnels de santé sur place afin qu'ils soient le plus compréhensibles possible. Procédures d'isolement et d'enterrement, mesures de protection, détail des soins… « Inutile d'envoyer des recommandations en jargon médico-technique pour experts internationaux, j'écris pour ceux qui sont en première ligne », explique-t-il.

UN RETARD DE QUATRE MOIS

Cela fait presque vingt ans que cet ancien vétérinaire aux airs de gentleman farmer traque Ebola en Afrique. Originaire de Perpignan, il a un jour tout plaqué pour diriger un laboratoire de virologie en Côte d'Ivoire et a découvert, en 1996, une nouvelle souche du virus chez les chimpanzés. Il a ensuite passé cinq ans dans les forêts du pays à rechercher le réservoir. En vain. Même s'il a pu établir un lien avec les chauves-souris. Depuis, il est envoyé sur le terrain dès que la fièvre hémorragique, découverte en 1976, refait surface.

Des apparitions « surprises » - « Le monde se croyait débarrassé des maladies infectieuses », dit-il - mais relativement « modestes » jusqu'à présent : quelques dizaines de personnes contaminées dans les années 1990 en République démocratique du Congo (ex-Zaïre) et au Gabon, puis au cours de la décennie suivante au Congo, au Soudan et en Ouganda. Et surtout, rapidement contenues. « Ce qui, à chaque fois, a demandé beaucoup de moyens, d'organisation et de coordination, souligne-t-il. C'est peut-être ce qui a fait défaut cette fois-ci. » C'est même certain.
Il a fallu attendre plus de quatre mois pour que l'OMS décrète l'état d'urgence. Tous les matins, à 9 h 30, le Dr Formenty se rend au sous-sol du bâtiment principal, dans la « SHOC room » (Centre stratégique d'opérations sanitaires), la salle de crise de l'OMS, « les yeux et les oreilles » de la riposte mondiale de l'institution aux épidémies et aux crises sanitaires. A 6 000 kilomètres des foyers infectieux et de la panique, c'est ici, dans une salle de réunion d'une surprenante banalité que se joue, dans le calme, la guerre contre Ebola. Ici, dans une pièce sans fenêtre où l'on ne pénètre qu'en montrant patte blanche, que chaque jour, depuis fin mars, les équipes de l'OMS font le point sur la situation et coordonnent les efforts pour stopper la contagion.
Si, au départ, ils n'étaient qu'une dizaine à se rassembler sous la houlette du Dr Richard Brennan, directeur du département Gestion des risques associés aux urgences et interventions humanitaires, depuis le mois d'août, ils sont environ quarante. Epidémiologistes, scientifiques, informaticiens, médecins, logisticiens, anthropologues (spécialistes du langage et des cultures locales) et, parfois, représentants d'organisations humanitaires... Tous scrutent les cinq écrans projetant les courbes de progression (en Sierra Leone) ou de décrue (au Liberia). Au bout du fil, le représentant de l'OMS au Ghana, le plus proche des pays contaminés, fait part de la situation sur place.

La mine grave, les experts épluchent et analysent les données (nombre de cas suspects et confirmés, de morts), recoupent les informations avec les résultats d'analyses des laboratoires et font le point sur les actions en cours. Au programme : amélioration du système de traçage des « contacts » (où le malade est-il allé ? Avec qui a-t-il été en relation ?), nouvelles recommandations concernant l'équipement de protection individuelle, ouvertures de centres de traitement, etc.
L'équipe du Dr Brennan passe également en revue l'aide financière internationale. La France, qui a promis 20 millions d'euros, est citée. Ce matin-là, le Dr Sylvie Briand, 50 ans, directrice du département Pandémies et épidémies, détend l'atmosphère : « Il est important de préciser que les gens peuvent aller boire un café ensemble à la cafétéria et se parler sans risquer d'attraper Ebola !, dit-elle. Cela me fait penser à Harry Potter : quiconque prononce le mot tabou  "Voldemort" déclenche un puissant sortilège brisant instantanément la protection magique. C'est un peu pareil, comme si on ne pouvait pas parler du virus sans être immédiatement infecté. » L'intervention fait sourire, mais elle révèle l'ampleur de la crainte - parfois injustifiée - que suscite le virus.
Même au sein de l'OMS, le mot Ebola fait peur. « Il a fallu faire circuler une note interne pour expliquer à tout le personnel que tant que les personnes ne présentent pas de symptômes, elles ne sont pas contagieuses », raconte le Dr Briand. La semaine précédente, elle a dû rassurer les écoles internationales de Genève qui envisageaient d'interdire aux enfants des salariés de l'OMS revenant de mission l'accès à leurs établissements. « Il faut trouver les bons mots : si on leur dit ''vous êtes ridicules'', ça ne marche pas », souligne-t-elle.
 
LE PLAN DE BATAILLE

Depuis le 3 novembre, le bureau du Dr Briand est installé au coeur d'un plateau situé au premier étage du bâtiment principal. C'est ici que sont désormais réunis, dans une ambiance très studieuse, tous les acteurs de l'OMS luttant contre le virus Ebola. Soit une centaine de personnes réparties par pôle d'activité : cartographie, recueil des données, soutien informatique, communication, engagement social (anthropologues en relation notamment avec les leaders religieux locaux, chrétiens et musulmans), science du virus, planning, finances, équipement et vaccins. Ces experts sont en liaison permanente avec environ 200 employés sur le terrain.

(...)

Par

 Lire la suite sur le site internet du journal Le Monde : http://abonnes.lemonde.fr/m-actu/article/2014/11/14/dans-le-qg-de-la-guerre-anti-ebola_4522917_4497186.html