Sur fond de crise dans les urgences, la ministre Agnès Buzyn défend ce projet de loi qui doit permettre un « meilleur accès aux soins ».
Réforme
des études de santé, hôpitaux de proximité, accès élargi aux données de
santé, lutte contre les déserts médicaux… Le Parlement a définitivement
adopté mardi 16 juillet, par un ultime vote du Sénat, le projet de loi
sur la santé, dont le système a besoin « en urgence », selon le gouvernement. Les sénateurs ont largement adopté le texte à main levée. Agnès Buzyn y voit un moyen « de
nous armer face aux nombreux défis auxquels nous devons faire face et
de garantir une offre de soin et de qualité pour tous ».
Le texte relatif à « l’organisation et à la transformation du système de santé »
porté par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, avait fait l’objet d’un
accord entre députés et sénateurs après son adoption en mars à
l’Assemblée puis, dans une version différente, en juin au Sénat.
Sur fond de crise dans les urgences, Mme Buzyn défend un projet de loi qui doit permettre un « meilleur accès aux soins sur le territoire », et notamment d’améliorer « l’accueil en ville en amont des urgences ».
En voici les principales mesures :
Fin du numerus clausus
Le
numerus clausus et le concours couperet limitant le nombre d’étudiants
admis en deuxième année de médecine, dentaire, pharmacie et maïeutique
(sage-femme) seront supprimés à la rentrée 2020. Les effectifs
d’étudiants en deuxième ou troisième année seront déterminés par les
universités, en accord avec les agences régionales de santé, selon les
capacités et les besoins des territoires.
L’objectif est d’« augmenter de 20 % » environ le nombre de médecins formés, selon Mme Buzyn,
tout en diversifiant leurs profils, grâce à des passerelles entre les
cursus et des critères de sélection qui restent à préciser par décret.
Les « épreuves classantes » en fin de sixième année de médecine vont également disparaître au profit de nouveaux examens.
Des ordonnances gouvernementales définiront par ailleurs les conditions d’une « re-certification » régulière des médecins, infirmiers et encore pharmaciens, pour vérifier que leurs compétences sont à jour.
Des labels « hôpitaux de proximité »
Le
projet de loi santé autorise le gouvernement à réviser la carte
hospitalière par ordonnances. Il doit permettre de labelliser entre 500
et 600 « hôpitaux de proximité » recentrés sur la médecine générale, la
gériatrie et la réadaptation.
En
fonction des besoins de la population et de l’offre de soins présente
sur les territoires sur lesquels ils sont implantés, les « hôpitaux de
proximité » pourront exercer d’autres activités, notamment la médecine
d’urgence, les activités prénatales et postnatales, les soins de suite
et de réadaptation ou encore les activités de soins palliatifs. A titre
dérogatoire et dans des conditions prévues par décret, certains actes
chirurgicaux pourront être pratiqués.
Lutte contre les déserts médicaux
Sur
la question délicate de la désertification médicale, un sujet phare du
grand débat découlant de la crise des « gilets jaunes », âprement
débattu dans les deux chambres, députés et sénateurs sont parvenus à un « compromis », selon les termes du rapporteur au Sénat Alain Milon (Les Républicains).
Le texte prévoit que les étudiants en dernière année de 3e cycle
effectueraient un stage sur le terrain d’au moins six mois et seront
supervisés par un médecin, pour les étudiants engagés dans la spécialité
de médecine générale. Le dispositif prévoit la possibilité d’étendre ce
parcours aux autres spécialités, selon des modalités qui seront prévues
par décret.
« Loin des
mesures coercitives, le texte oblige les facultés et agences régionales
de santé à trouver des terrains de stages en priorité dans les
territoires en tension », s’est félicitée Mme Buzyn.
Le
dispositif de médecin adjoint, qui permet à un interne d’assister un
médecin en cas d’afflux saisonnier dans les zones touristiques, sera par
ailleurs étendu aux zones en manque de médecins. Un statut unique de
praticien hospitalier sera également créé par ordonnance.
Le recrutement de professionnels étrangers facilité
Indispensables
au fonctionnement de nombreux hôpitaux publics, mais en théorie
interdits d’exercice, certains médecins, pharmaciens, dentistes et
sages-femmes diplômés hors de l’Union européenne (Padhue) pourront voir
leur situation régularisée d’ici à la fin 2021 après étude de leur
dossier. Les « modalités de recrutement » des Padhue qui « exerceront à l’avenir en France » seront rénovées, prévoit le texte.
Pharmaciens et médicaments
Les
pharmaciens pourront délivrer dans certaines conditions des médicaments
normalement sous ordonnance, pour des pathologies bénignes comme des
cystites ou angines. Les pharmaciens pourront aussi prescrire
directement certains vaccins, dans certaines conditions.
Les
infirmiers pourront, eux, adapter dans certains cas des traitements en
fonction des résultats d’analyses biologiques des patients.
« Multiplier les possibilités d’exploitation » des données de santé
Une « plate-forme des données de santé »
remplacera l’actuel Institut des données de santé. L’accès à ces
données (1,2 milliard de feuilles de soin par an, 500 millions d’actes
médicaux, onze millions d’hospitalisations…) sera élargi, et leur champ
étendu aux données cliniques recueillies par exemple par les médecins
libéraux, ainsi qu’aux « données à caractère personnel issues d’enquêtes ».
Le gouvernement entend « multiplier les possibilités d’exploitation » de ces informations, notamment pour la recherche ou le « développement des méthodes d’intelligence artificielle », en promettant « un haut niveau de protection de la vie privée ».
Un espace numérique personnel
Tous les patients auront leur propre espace numérique de santé d’ici au 1er janvier 2022, pour accéder notamment à leur dossier médical partagé (sorte de carnet de santé), à des « applications » ou « informations de santé référencées ».
Les données de l’espace numérique ne pourront être exigées lors de la conclusion d’un contrat de complémentaire santé.
« Télésoin » chez les pharmaciens et auxiliaires médicaux
La
télémédecine aura bientôt son pendant chez les pharmaciens et les
auxiliaires médicaux avec le « télésoin », qui pourra, par exemple,
concerner « l’accompagnement par les infirmiers des effets
secondaires de chimiothérapies orales ou encore les séances
d’orthophonie et d’orthoptie à distance ».
Source : Le Monde, 18/07/2019.
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