mercredi 28 octobre 2020

Allongement du congé paternité, « forfait urgences » de 18 euros à l’hôpital… Ce que contient le budget de la Sécu

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021 a été adopté, mardi, en première lecture à l’Assemblée nationale.


Au centre hospitalier intercommunal André-Grégoire, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), le 13 octobre 2020. 

Percuté par la crise sanitaire, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 a été adopté, mardi 27 octobre, en première lecture à l’Assemblée nationale, par 326 voix pour, 204 contre et quatre abstentions. Le texte poursuivra ensuite son parcours parlementaire, à partir du 9 novembre, au Sénat.

  • Une rallonge pour les hôpitaux

Sans surprise, les dépenses de santé ont explosé en raison de l’épidémie de Covid-19, ce que traduit le PLFSS. Près de 15 milliards d’euros (masques, tests, primes…) avaient initialement été budgétés dans le texte, mais l’exécutif a fini par annoncer une rallonge de 2,4 milliards d’euros pour aider les établissements de santé à affronter la nouvelle vague.

Pris dans un redoutable effet ciseaux, entre des dépenses qui se sont envolées et des recettes qui se sont effondrées, les comptes de la Sécurité sociale ont plongé. Son déficit devrait désormais atteindre 46,6 milliards d’euros cette année – du jamais-vu –, avant de se replier à 28 milliards d’euros en 2021, soit le précédent record atteint il y a dix ans, deux ans après la crise économique.

  • Un « forfait urgences »

En 2021, les patients qui se présenteront aux urgences mais ne nécessiteront pas une hospitalisation devront débourser 18 euros, pris en charge par leur complémentaire santé. Cette mesure, qui a été beaucoup critiquée, « ne coûte rien », a affirmé le ministre de la santé, Olivier Véran. Le nouveau système remplacera l’actuel ticket modérateur, facturé à hauteur de 20 % des frais d’hospitalisation. Souvent pris en charge par les mutuelles, ce reste à charge pouvait être « plus important » que les 18 euros, selon le ministre.

« Ce n’est pas du tout une mesure qui a un but financier, a souligné M. Véran. Cette mesure permet de mobiliser du personnel à l’hôpital pour faire autre chose que de la facturation, par exemple des soins, de l’accueil. » Ce forfait sera réduit à 8 euros pour les invalides de guerre et les personnes atteintes de maladie chronique. Les femmes enceintes et les nourrissons de moins d’un mois en seront exemptés.

  • Création d’une branche dépendance

Le PLFSS 2021 prend acte de l’apparition d’une nouvelle branche dont la création a été entérinée durant l’été par le Parlement. Consacrée à la perte d’autonomie des personnes âgées et handicapées, elle s’ajoute aux quatre déjà existantes (maladie, accidents du travail et maladies professionnelles, vieillesse et famille).

Mais les moyens alloués – des fléchages déjà existants – ont donné lieu à des débats âpres en séance. Un projet de loi « grand âge », promis par le gouvernement « dans les prochains mois », doit venir en préciser les financements. La droite a dénoncé un projet « sous-financé » avec « aucun moyen nouveau » et « un bien mauvais départ ». Une décision « soi-disant historique » qui n’est « pas au rendez-vous des ambitions » pour la gauche. La ministre déléguée chargée de l’autonomie, Brigitte Bourguignon, a reconnu que c’était une « première étape » d’une « construction collective ».

Le gouvernement a également introduit un amendement pour attribuer une enveloppe de 150 millions d’euros en 2021, puis 200 millions à partir de 2022, afin d’augmenter les salaires des aides à domicile, qui interviennent chez des personnes âgées ou handicapées. Les professionnels du secteur estiment les besoins supplémentaires à 600 millions d’euros.

  • Doublement du congé paternité

A partir de juillet 2021, le congé paternité sera porté à quatre semaines, dont sept jours obligatoires. Cette mesure a « une dimension quelque peu historique », a souligné, dans l’hémicycle, le secrétaire d’Etat chargé de l’enfance et des familles, Adrien Taquet.

Actuellement fixé à quatorze jours – trois jours de congé de naissance à la charge de l’employeur et onze financés par la branche famille de la Sécurité sociale –, il passera à vingt-huit jours, avec une prise en charge inchangée pour l’employeur. Son coût est évalué entre 250 millions et 260 millions d’euros en 2021, puis autour de 500 millions d’euros en année pleine.

Le congé pour adoption est également allongé de dix à seize semaines pour les familles n’ayant pas d’enfant ou un seul enfant à charge. Par ailleurs, les députés ont voté pour une extension des maisons de naissance, ces structures autonomes où des sages-femmes effectuent des accouchements physiologiques dits « naturels ». Il en existe actuellement huit et le texte prévoit la création de douze nouvelles structures dans les deux ans.

  • Un « droit nouveau » pour les professions libérales

C’est un « amendement important » de l’exécutif, a vanté M. Véran en séance, qui crée « un droit nouveau ». Conséquence de la crise sanitaire, plus d’un million de soignants, pharmaciens, vétérinaires, notaires ou encore architectes (affiliés à la Caisse nationale d’assurance-vieillesse des professions libérales) vont pouvoir bénéficier de l’instauration d’indemnités journalières maladie, et ce, dès les premiers jours de l’arrêt de travail – ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Le dispositif, contributif, sera unique et obligatoire pour l’ensemble de ces professionnels libéraux.

  • Taxe sur les mutuelles

Le pouvoir en place a décidé de mettre à contribution les complémentaires santé, au titre des économies qu’elles ont réalisées pendant la première vague de l’épidémie au printemps. Elles seront taxées à hauteur de 1 milliard d’euros cette année et de 500 millions d’euros en 2021 avec une clause de revoyure « en fonction de l’évolution de la situation sanitaire » selon le texte. Face à des critiques dans l’hémicycle, le ministre chargé des comptes publics, Olivier Dussopt, a assuré que le gouvernement était « attaché » à ce « qu’il n’y ait pas de hausse des tarifs », assurant qu’un « message très clair » avait été envoyé aux organismes en ce sens.

Source : Le Monde, 27/10/2020.

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