dimanche 1 juin 2014

Ces très chers stages Une proposition de loi prévoit de rendre ces périodes non imposables

                                        

A la faveur de la professionnalisation et de l'internationalisation des cursus, la pratique des stages en entreprises s'est considérablement développée au cours des années 2000. A l'université, ils concernent tous les cursus, et, dans les écoles de commerce, qu'il s'agisse des grandes écoles, des post-bac ou des écoles d'ingénieurs, ils sont devenus systématiques.


Non seulement les étudiants ont l'obligation d'effectuer des stages d'une durée de plus en plus longue pour valider leurs diplômes (quatre à six mois, selon les années et les écoles…), mais la plupart de ces établissements incitent leurs élèves à prendre une année de césure pour faire des stages d'un an, de préférence à l'étranger… Conséquence, " pour une majorité d'étudiants, la durée totale de travail comme stagiaire au cours de leurs études dépasse aujourd'hui un an ", précise le rapport de la députée (PS) Chaynesse Khirouni, déposée au nom de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale le 14 février.

Outre le fait qu'il existe de " nombreuses situations d'abus où les stages sont utilisés en substitution de l'emploi ", note le rapport, ces stages coûtent souvent très cher aux étudiants et à leurs parents. C'est particulièrement vrai pour les jeunes qui sont inscrits dans des écoles de commerce privées dans lesquelles les frais de scolarité tournent autour de 8 000 euros par an, à payer pendant trois ans, voire cinq ans pour les écoles post-bac…

Pendant les périodes de stage, non seulement les frais de scolarité sont identiques, mais les parents font face à des coûts supplémentaires, notamment lorsque le stage est en province ou à l'étranger. Et si ces stages sont accomplis lors d'une année de césure, il faut quand même acquitter des droits de scolarité : 750 euros de " frais de suivi administratif " chez HEC et même le quart des frais annuels d'inscription pour Sciences Po Paris. Soit une année facturée 2 500 euros pour les étudiants qui paient les droits les plus élevés, sans pour autant mettre les pieds dans l'établissement.

A cette facture s'ajoute la note fiscale. Si le stage a duré plus de trois mois ou ne fait pas partie intégrante du programme de l'école – ce qui est le cas des stages accomplis dans le cadre d'une année de césure –, les indemnités perçues sont imposables. Autrement dit, si les parents rattachent leur enfant étudiant à leur foyer fiscal, ce qui est souvent dans leur intérêt, car ils bénéficient ainsi d'une demi-part, ou d'une part supplémentaire, ils doivent réintégrer l'indemnité de stage dans leurs revenus imposables, et donc payer des impôts dessus.

Du moins pour le moment, car une proposition de loi, en cours de discussion devant le Parlement, devrait rendre les stages non imposables. Le texte prévoit ainsi que les stages en entreprise soient exonérés, quelle que soit leur durée, dans la limite d'un plafond égal au smic.

En attendant, les juges ont admis que les parents pouvaient déduire de leurs revenus imposables les frais acquittés pour la scolarité de leur enfant ainsi que le loyer qu'ils avaient payé pour le loger à proximité de son stage (en l'occurrence, l'enfant était étudiant à Lyon et avait accompli un stage à Boulogne-Billancourt dans les Hauts-de-Seine). Dans ce cas, il est recommandé de conserver les justificatifs, car l'administration fiscale peut vous les réclamer.

Enfin, tant que l'indemnité de stage ne dépasse pas le " minimum légal " de 436,05 euros par mois pour un temps plein, aucune cotisation sociale n'est due, ni par l'entreprise ni par le stagiaire. Conséquence, le jeune n'acquiert aucun droit pour sa retraite.

Pour remédier en partie à cette situation, la nouvelle réforme des retraites du 20 janvier prévoit que les jeunes peuvent désormais valider leurs périodes de stage, dans la limite de deux trimestres. Pour cela, ils devront verser une cotisation entièrement à leur charge (l'entreprise n'a rien à payer). Son montant, qui devrait s'établir à 300 euros par trimestre, doit être fixé par un décret, qui n'a toujours pas été publié. Mais cette opération n'est, de toute façon, pas intéressante. Racheter des trimestres au début de sa carrière est un pari risqué, car les règles ont de grandes chances de changer à l'avenir, ce qui pourrait rendre inutile cette opération.
Nathalie Cheysson-Kaplan
© Le Monde

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