Une manifestation nationale est organisée
mardi contre les ordonnances présentées par le gouvernement Philippe.
Que contiennent-elles et qu’est-ce qui va changer ?
La réforme du code du travail est un projet complexe, qui suscite de nombreux commentaires et interprétations. Que contient le texte ? Qu’est-ce qui va changer pour les salariés français ? Les Décodeurs proposent de répondre aux questions les plus fréquentes des lecteurs :
Comment s’appelle exactement cette nouvelle réforme : « loi travail », « loi Pénicaud », « loi travail XXL » ?
Elle se situe dans la continuité de la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, communément appelée « loi travail » ou « loi El Khomri », qui avait été adoptée à la fin du quinquennat de François Hollande, malgré une vive opposition syndicale et politique.
Cette nouvelle réforme est désormais portée par Muriel Pénicaud, mais elle n’est que rarement présentée comme la « loi Pénicaud ». Ses détracteurs l’ont renommée « loi travail XXL », considérant qu’elle amplifie la réforme précédente. Techniquement, elle a pris la forme d’ordonnances (« pour faciliter le dialogue social », selon le gouvernement) plutôt que d’une loi discutée au Parlement. Pour rester descriptifs, nous avons choisi de la qualifier de « réforme du code du travail ».
Pourquoi faire passer la loi par ordonnances ?
Les ordonnances accélèrent la procédure en contournant le débat parlementaire. Il se déroule tout de même en plusieurs étapes. L’Assemblée nationale et le Sénat ont voté début août une loi d’habilitation qui autorise le gouvernement à légiférer par ordonnances sur la réforme du travail. Le contenu des textes (disponible sur le site du gouvernement) a été rendu public le 31 août. Les ordonnances doivent être adoptées en conseil des ministres le 22 septembre et seront alors applicables. Mais ce n’est qu’après avoir été ratifiées par le Parlement, probablement en octobre, qu’elles deviendront une véritable loi.
Définition :
Gouverner par ordonnance, ça veut dire quoi ?
Parallèlement, le gouvernement a lancé une concertation avec les
syndicats et le patronat durant l’été pour les associer à la préparation
de la réforme, davantage que pour la loi El Khomri. Ce qui n’empêchera
pas la contestation dans la rue : la CGT a appelé à une manifestation le
12 septembre, alors que La France insoumise organise son propre défilé
le 23 septembre.Qu’est-ce qui change par rapport à la loi El Khomri ?
Plusieurs points qui figuraient dans la première version du projet de loi El Khomri avaient été abandonnés dans le texte final sous la pression des syndicats, notamment le plafonnement des indemnités prud’homales (comme nous l’avions détaillé dans cet article) ou la possibilité pour une multinationale de procéder à des licenciements économiques en France même si leur maison mère est en bonne santé financière.
Concernant la hiérarchie des normes, la loi El Khomri avait opéré un premier bouleversement, en faisant primer les négociations au niveau des entreprises sur celles des branches professionnelles, uniquement sur la question du temps de travail. Le nouveau texte étend le champ des négociations possibles au niveau des entreprises, tout en limitant ce qui relève de l’accord de branches.
Enfin, d’autres mesures nouvelles ont été introduites, comme la rupture conventionnelle collective, qui devient une version moins contraignante pour l’employeur du plan de départ volontaire, ou la fusion de différentes instances de représentation du personnel.
C’est quoi exactement « inverser la hiérarchie des normes » ?
Cette notion s’applique aussi pour le code du travail. Régi par la loi, il prime sur les accords de branches (négociés par les représentants d’un secteur d’activité, comme la métallurgie), qui eux-mêmes ont plus de force qu’un accord d’entreprise, et que le contrat de travail. En principe, un accord de niveau inférieur ne peut pas être « moins disant », c’est-à-dire moins favorable au salarié, que le niveau supérieur.
Pour mieux comprendre :
Loi travail : quelle est cette « inversion de la hiérarchie des normes » qui fait débat ?
Mais pour favoriser la souplesse au niveau des entreprises, des
dérogations avaient déjà été introduites par plusieurs lois, notamment
en 2004 et 2008, en conservant le principe d’éviter les dispositions
moins disantes pour les salariés. En 2016, la loi El Khomri est allée
plus loin, car elle permet qu’un accord d’entreprise sur le temps de
travail soit moins favorable que l’accord signé par la branche
professionnelle.Qu’est-ce qui sera négocié au niveau des branches et au niveau des entreprises ?
- dans 11 domaines, la branche aura forcément la primauté : salaires minima, classifications professionnelles, pénibilité, égalité hommes-femmes, période d’essai, temps partiel, prévoyance, mutualisation des fonds paritaires et de la formation professionnelle, modalités du CDD et recours aux CDI d’opération. Comme le détaille Libération, certains de ces domaines « redescendent » d’un cran dans l’échelle des normes car ils étaient jusqu’à présent gérés par le code du travail, sans dérogation possible.
- dans 4 domaines, les branches peuvent choisir de faire primer leurs accords sur les accords d’entreprise : prévention des risques professionnels, insertion des handicapés, primes pour travaux dangereux, nombre de représentants syndicaux.
- pour tout le reste, des accords d’entreprises peuvent désormais primer sur le code du travail, même s’ils sont moins avantageux pour les salariés.
Pourquoi le plafonnement des indemnités prud’homales est si important ?
Le Monde, 12/09/2017.
Article intégral en ligne : http://www.lemonde.fr
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