mardi 5 avril 2016

Pourquoi le nombre de maternités a été divisé par trois en quarante ans

Deux « maisons de naissance » ont officiellement ouvert leurs portes vendredi 1er avril en France, à Paris et à La Réunion. Ces petites structures dirigées par des sages-femmes et destinées à accompagner des futures mamans ayant une grossesse normale sont une alternative à l’accouchement classique en maternité, modèle ultra-dominant en France.

En effet, seules 1 % à 2 % des naissances ont lieu en dehors du milieu hospitalier, que ce soit par choix (accouchement assisté à domicile avec une sage-femme) ou par un concours de circonstances (accouchement inopiné, survenant parfois durant le transport).

Plus regroupées et plus techniques

Mais le paysage des maternités a beaucoup évolué durant ces quarante dernières années. En 1972, le décret Dietrich a entraîné la fermeture des maternités tenues par des sages-femmes. Un nombre de quinze lits minimum a ensuite été imposé pour maintenir les structures, puis progressivement des normes de plus en plus strictes d’encadrement ont été prises, qui ont entraîné des regroupements de maternités.
 
 En 1998, les maternités ont été divisées en trois types, selon leur degré de technicité :
  • niveau I, avec une simple unité d’obstétrique, pour les grossesses à bas risques et les naissances normales ;
  • niveau II, disposant en plus d’une unité de néonatalogie pour les risques modérés et les nouveau-nés nécessitant une surveillance particulière ;
  • niveau III, offrant en plus de tout cela un service de réanimation néonatale, pour les grossesses à risques et les grands prématurés.
Alors que les naissances sont restées relativement stables, autour de 800 000 par an en France, le nombre de maternités a été divisé drastiquement. Et ce sont les établissements les moins techniques (niveau I) qui ont fait les frais de cette concentration.

Le regroupement des établissements s’est fait au détriment des structures les plus petites : alors que 107 maternités réalisaient moins de 500 accouchements par an en 2003, elles n’étaient plus que 57 en 2010. Parallèlement, durant ces sept années, les grosses maternités (plus de 2 000 naissances annuelles) sont passées de 95 à 137 établissements.
La part des accouchements réalisés dans les hôpitaux n’a cessé d’augmenter, au détriment des cliniques privées ou mutualistes : le secteur public accueillait la moitié des naissances en 1975, et plus des deux tiers quarante ans plus tard.

Davantage d’interventions médicales

Le développement de maternités plus grandes, dotées d’anesthésistes et de matériel plus sophistiqué, gérant un plus grand nombre de naissances, s’est accompagné d’une hausse d’actes médicaux :
  • La péridurale est devenue la norme. Cette anesthésie locale, qui réduit les douleurs de l’accouchement, est apparue au début des années 1980 de manière confidentielle (moins de 4 % des naissances). Considérée comme un progrès pour les femmes, elle s’est développée très rapidement, a été remboursée par la Sécurité sociale en 1994, et s’est aujourd’hui quasi généralisée (76 % des naissances en 2012).
  • Deux fois plus de césariennes en trente ans. La césarienne, opération destinée à extraire le bébé par voie abdominale, utilisée pour réduire les risques d’un accouchement classique par voie basse, est pratiquée dans un accouchement sur cinq. Or selon une étude de l’Inserm, un quart des césariennes pourraient être évitées.
  • Deux fois plus de déclenchements en trente ans. Il s’agit de provoquer le début du travail conduisant à l’accouchement, par des injections d’hormones ou des actions mécaniques sur le col de l’utérus. Certains accouchements sont déclenchés pour des raisons médicales, notamment lorsque le terme est dépassé, d’autres pour des questions de convenance. La Haute Autorité de santé recommande d’informer les femmes qu’elles peuvent refuser certains déclenchements artificiels.
 
Le Monde, 01/04/2016.


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