mardi 27 octobre 2015

Comprendre les réfugiés dans l’Europe de 2015

1/ Qui sont les réfugiés dans le monde ?

Parmi plus de 200 millions de migrants dans le monde, les réfugiés étaient comptabilisés ainsi, en 2014 :
• 3 900 000 Syriens,
• 2 600 000 Afghans,
• 1 110 000 Somaliens,
• 666 000 Soudanais,
• 616 000 Sud-Soudanais.
Soit à peu près 9 M (4,2 % des migrants).

2/ Qui sont les réfugiés qui arrivent en Europe ?

Ils étaient 280 000 migrants à arriver aux portes de l’Europe en 2014, année durant laquelle les Syriens furent 79 000 personnes (28 % des entrées dans l’Union européenne), les Érythréens 34 500 (12 %), les Afghans 22 000 et les Kosovars 22 000 (8 % pour chacun d’eux). Ce chiffre a presque doublé en 2015. Ils sont depuis le 1er janvier 2015 au moins 500 000, dont 156 000 migrants qui sont arrivés sur le sol européen en août (88 000 en Grèce – des Syriens surtout – , 52 000 en Hongrie – venant essentiellement de Serbie –, 13 000 en Italie, provenant d’Érythrée ou d’Afrique subsaharienne). Cette augmentation très forte s’explique avant tout par la guerre en Syrie.


3/ Quels quotas de répartition des réfugiés en Europe ?

En septembre, la Commission européenne décidait de quotas de répartitions des 160 000 réfugiés comptabilisés à ce moment : l’Allemagne accueillerait 31 443 réfugiés, la France 24 031, l’Espagne 14 931. Pour autant, ces quotas n’ont pas été appliqués, car les dissensions sont grandes à l’intérieur de l’Europe : d’un côté, les pays européens de l’Est ferment leurs frontières (Roumanie, Hongrie, Pologne, Slovaquie, République tchèque) ; de l’autre, l’Allemagne, dans un geste d’ouverture sans précédent aux migrants, a déjà accueilli bien plus que le quota qui lui a été attribué – ce pays pourrait avoir reçu, selon les estimations, quelque 800 000 réfugiés pour toute l’année 2015. Enfin, un plan d’action est conclu le 15 octobre entre la Commission européenne et la Turquie, pays par où transite la majeure partie des réfugiés. Trois milliards d’euros seront versés à ce pays qui s’engage en contrepartie à maintenir les quelques 2 millions de réfugiés syriens sur son sol.

Les quatre principaux pays d’origine des réfugiés

A/ L’exode syrien

La Syrie est une dictature militaire sinistrée par plusieurs guerres. Lors du conflit initial (2011), le chef de l’État Bachar et-Assad a massacré sans état d'âme ses opposants (appuyés par les États-Unis et le Qatar), avec l’aide du Hezbollah libanais et de milices chiites irakiennes, de la Russie et de l’Iran. Un autre conflit a ensuite opposé les rebelles à Daesh, lequel s’est par la suite aussi affronté à l’État syrien. Enfin, un conflit a lieu entre les Kurdes de la frontière syrienne et Daesh. La situation se complique avec le jeu des alliances ou oppositions entre la branche syrienne d’Al-Qaida et Daesh. Cet imbroglio guerrier pousse de nombreux Syriens à l’exil. Quelque quatre millions se sont d’abord réfugiés au Liban, en Jordanie, en Turquie et en Irak. Toutefois, parmi eux, plus de 300 000 ont choisi l’Europe pour destination : d’abord parce que leur premier lieu d’accueil les rejette ou ne les intègre pas et les maintient dans des camps, ensuite parce qu’ils espèrent trouver en Europe soins de santé, aide alimentaire, accès au marché du travail et accès à l’éducation. En août 2015, ils étaient précisément 4,41 millions de réfugiés, répartis dans le monde de la façon suivante : 1,9 million en Turquie ; 1,1 million au Liban ; 629 000 en Jordanie ; 348 000 en Europe ; 249 000 en Irak ; 132 000 en Égypte ; 53 000 dans les autres pays. À souligner toutefois que, depuis peu, de nombreux réfugiés Syriens préfèrent revenir dans leur pays dévasté plutôt que de continuer à affronter les difficultés de l’exil : précarité, absence de nourritures ou d’aides financières, etc.

B/ Réfugiés d’Érythrée

L’Érythrée est l’une des pires dictatures du continent africain. Depuis l’indépendance du pays (1993), le pays est dirigé par le dictateur Issayas Afeworki, ancien héros de la guerre contre l’Éthiopie. Ce pays de 5 millions d’habitants, très pauvre, qui bénéficie d’appuis financiers provenant du Qatar, n’a ni constitution, ni presse libre, ni opposition politique ; il est dirigé par un parti unique, le Front populaire pour la démocratie et la justice. La nation est décrite par de nombreux commentateurs comme une « prison-caserne » : on estime que 10 000 prisonniers politiques sont détenus en prison dans des conditions inhumaines, sans chef d’inculpation, sans jugement, sans contact avec leurs familles. Au cours de rafles, l’armée enrôle de force les hommes de 15 à 50 ans. On comprend que de nombreux Érythréens viennent chercher asile en Europe ou ailleurs.

C/ Réfugiés d’Afghanistan

À la suite des attentats du 11 septembre 2001 sur le sol américain, l'administration de Georges Bush Jr. déclara la guerre contre le terrorisme et envahit l’Afghanistan. Ayant chassé les Talibans du pouvoir, les troupes américaines pensent avoir libéré le pays, et rentrent progressivement au bercail. Pourtant, en réalité, dans un contexte d’instabilité politique grandissant après le départ d’Hamid Karzai (lequel fut placé temporairement au pouvoir par les Américains), les Talibans ont assis leur contrôle dans certaines régions du Sud et depuis peu elles mènent des raids dans le Nord, prenant temporairement la ville de Kunduz. Pour rajouter aux malheurs des Afghans, Daesh a lancé une offensive en Afghanistan contre les Talibans. Pour toutes ces raisons, de nombreux Afghans choisissent la route de l’exil.

D/ Réfugiés du Kosovo

Depuis quelques années, de plus en plus de familles, même si elles ont une situation économique correcte, quittent le Kosovo pour la Hongrie, l’Allemagne ou l’Autriche. Ce pays, indépendant depuis 2008, garde une souveraineté limitée et se trouve partiellement dirigé, en matière de police et de justice, par l’Otan et l’Union européenne. Mais le clientélisme, la corruption, la faillite du système judiciaire et le crime organisé contribuent grandement à déstabiliser le pays, qui se vide de plus en plus de ses habitants.

Sciences Humaines, 20/10/2015.Régis Meyran.

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire