jeudi 14 mars 2019

L’inégalité, ce fléau qui rend chacun de nous malheureux

Anxiété, obésité, toxicomanie, violence... Les signes de mal-être dans les sociétés « riches » sont légion. Dans « Pour vivre heureux, vivons égaux ! », les épidémiologistes Richard Wilkinson et Kate Pickett montrent que les inégalités sociales ont un impact délétère sur chaque individu. Entretien.

« Je ne sais pas comment je n’ai pas réalisé avant que tous les problèmes que je voyais étaient aggravés dans une société inégalitaire. » Pendant des années, Richard Wilkinson a compilé des données, dans son laboratoire. Et un jour, au milieu des années 1980, il a identifié le mal : les inégalités de revenus. Parce qu’elles entraînent des rapports plus violents entre les individus. Dans son premier best-seller, écrit avec Kate Pickett, « Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous », il décortiquait la manière dont les sociétés inégalitaires aggravent une grande partie des maux sanitaires et sociaux : violence, addictions, consumérisme… Dans ce deuxième opus, les deux chercheurs s’intéressent à l’individu.

Dans ce livre, vous changez de focale : de la société vers l’individu. Comment l’inégalité change-t-elle les rapports entre les individus, et produit de l’anxiété sociale ?

L’inégalité renforce l’importance donnée à la position sociale et aux classes sociales. Plus une société est hiérarchisée, plus l’idée que nous sommes classés en fonction de notre mérite intrinsèque est profondément ancrée, et plus chacun en vient à douter de sa valeur. Cela exacerbe la menace d’évaluation sociale et l’angoisse du statut. La timidité, la phobie sociale ou le doute sont beaucoup plus fréquents dans les sociétés inégalitaires.
Par exemple, aux États-Unis ou en Angleterre, on assiste à « une épidémie d’anxiété sociale ». Elle a des répercussions sur la santé. Entretenir des relations agréables et participer à des activités collectives sont aussi déterminants sur la santé que le fait de ne pas fumer. Des études expérimentales le montrent : des volontaires ont accepté de se voir infliger une blessure sur le bras. La lésion guérit moins rapidement chez ceux qui ont moins d’amis. On a aussi inoculé le virus du rhume par des gouttes nasales à d’autres volontaires. Ceux qui déclaraient avoir moins d’amis avaient quatre fois plus de chances de développer un rhume…

Vous dites qu’il y a un lien entre inégalités et de moindres relations amicales… En quoi ?

Dans les sociétés où règnent de très grands écarts de revenus, la vie locale est indigente. À l’inverse, les sociétés avec de faibles écarts sont beaucoup plus soudées. Leurs habitants ont plus de chance d’être impliqués dans des groupes de quartier ou des associations.

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Source : L'Humanité, 07/03/2019.
Article intégral en ligne : https://www.humanite.fr

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