L’auteur du documentaire « Corpus Christi » et l’économiste déconstruisent les fondamentaux de l’économie moderne en six épisodes.
Après Dieu, l’économie. Rien de moins. Gérard Mordillat, bien connu du grand public pour la formidable série documentaire sur la Bible Corpus Christi, réalisée en 1997 en collaboration avec Jérôme Prieur, s’est lancé dans la tâche à la fois aride et titanesque de rendre accessibles au plus grand nombre les grandes notions de l’économie moderne : travail, emploi, salaire, marché, capital et profit. Le tout en six épisodes, dont les deux derniers sont uniquement disponibles en ligne, sur Arte.tv.Plus qu’un travail de vulgarisation, Gérard Mordillat, avec la complicité de l’économiste Bertrand Rothé, s’est attelé à donner du sens à ces notions, omniprésentes dans les médias, les discours des politiques et les conversations « en ville », mais souvent mal maîtrisées, et donc mal comprises. Pour ce faire, les réalisateurs de Travail, salaire, profit sont partis à la rencontre d’un éventail des meilleurs chercheurs actuels, qu’ils soient économistes, historiens, philosophes ou juristes. Dans un décor dépouillé qui reprend les codes adoptés par Corpus Christi – sur fond noir et sans aucune voix off –, chaque intervenant est invité à s’exprimer sur une notion, réfléchir à une définition, valider ou non une hypothèse. La structuration du propos est assurée a posteriori, par le biais d’un montage rigoureux.
Approche vivante
Qu’est-ce
qu’une crise économique ? Qu’est-ce qui différencie le travail de
l’emploi ? Comment la classe ouvrière a-t-elle disparu ? Quelles sont
les origines de la crise du fordisme ? Comment crée-t-on de la valeur ?
Voici quelques-unes des questions qui seront posées au fil des épisodes.
Que les néophytes se rassurent, il n’est pas besoin de maîtriser les
concepts de base de la microéconomie pour comprendre les réponses :
l’approche se veut vivante, concrète, illustrée par de nombreux exemples
tirés de toutes les sciences humaines. La diversité culturelle des
intervenants garantit la richesse de leur propos et permet de saisir
pourquoi l’économie est intimement liée à une certaine vision du monde.
Travail, salaire, profit
n’en est pas pour autant une œuvre pédagogique et ne s’adresse pas à
tous les publics : la série a beau être incroyablement nourrie et
documentée, elle reste assez peu digeste, tant sur le fond que sur la
forme. Pour les moins armés, la succession de séquences parlées peut
s’avérer difficile à suivre. Au point d’en sortir avec l’impression
d’avoir entendu beaucoup de choses intéressantes, mais de ne finalement
pas avoir retenu grand-chose.
Ce
n’est cependant pas la principale limite de cette série documentaire,
car ce parti pris a le grand avantage de rappeler que l’économie est une
science complexe, parfois approximative, dont de nombreux pans ne font
pas consensus, et qu’elle n’est pas simplifiable à l’extrême. La limite
de Travail… est ailleurs, dans la composition de son
panel d’invités : de Frédéric Lordon à David Graeber, en passant par
Kako Nubukpo, Robert Pollin ou Danièle Linhart, le courant
« hétérodoxe » (par opposition aux « orthodoxes », qui, pour aller très
vite, croient en la rationalité des acteurs du marché) semble largement
majoritaire.
Source : Le Monde, 15/10/2019.
Emission à voir ou revoir : https://www.arte.tv/fr/videos/RC-018077/travail-salaire-profit/
Source : Le Monde, 15/10/2019.
Emission à voir ou revoir : https://www.arte.tv/fr/videos/RC-018077/travail-salaire-profit/
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