mardi 24 mai 2016

Une réforme majeure pour rétablir l’égalité des Français face à l’hôpital

À l’avenir, tous les hôpitaux auront l’obligation de mieux coopérer au niveau local. Pour éviter que seuls les patients « initiés » sachent où aller se faire soigner.
Accueil au service des urgences à l’hopital de Marseille
 
Accueil au service des urgences à l’hopital de Marseille / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT/AFP

C’est une réforme majeure qui met pas mal d’hôpitaux en ébullition. « Un projet aussi important que la création des CHU en 1958 », salue Gérard Vincent, qui vient de quitter son poste de délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF). Cette réforme s’articule autour de 3 lettres : GHT, pour Groupements hospitaliers de territoire. « Ma conviction est que l’avenir du service public hospitalier réside dans une synergie d’hôpitaux ouverts les uns aux autres », a indiqué, mardi 24 mai, la ministre de la santé Marisol Touraine
L’idée de départ est simple : obliger tous les hôpitaux à créer des coopérations locales. « L’objectif est de créer des filières de soins cohérentes tout en mutualisant certaines activités », souligne Gérard Vincent. Un projet pragmatique visant à éviter des « doublons » entre certains hôpitaux proches géographiquement qui, parfois, se regardent en chiens de faïence et se font concurrence en voulant absolument garder leur maternité ou leur service de chirurgie.

Un regroupement devenu obligatoire

Un premier mouvement avait été amorcé en 2012 avec la création des communautés hospitalières de territoire (CET). Mais le projet, alors, reposait sur le volontariat. Et au final, peu d’hôpitaux ont accepté de coopérer les uns avec les autres. Actuellement moins d’un sur quatre fait partie d’une communauté de territoire.
C’est la raison pour laquelle Marisol Touraine a décidé de changer de braquet en instaurant ces GHT dans sa loi santé. Et en obligeant tous les hôpitaux à se regrouper. « Au final, on devrait avoir de 150 à 180 groupements qui réuniront un peu plus d’un millier d’établissements », souligne Gérard Vincent.

Un projet médical partagé

Dans chaque groupement, il y aura un hôpital « support », en général le plus gros hôpital du bassin de vie concerné. Autour de lui graviteront quatre ou cinq établissements de plus petite taille. « L’objectif, ensuite, est de faire une gradation des soins autour d’un projet médical partagé », explique le professeur Dominique Rossi, président de la commission médicale d’établissement (CME) des hôpitaux de Marseille.
À l’échelle d’un petit département, l’idée serait, par exemple, de décider que tous les patients atteints de cancer devront plutôt aller dans le CHU de référence. Et que tel petit hôpital aura vocation à accueillir des patients en soins de suite après une opération.

Lutter contre les inégalités face à la santé

L’ambition est de lutter contre les inégalités des Français face à la santé. « Force est de constater qu’aujourd’hui, une partie des usagers de l’hôpital public bénéficient de ce qu’on pourrait qualifier de "parcours d’initiés" », soulignait un rapport remis l’an passé à Marisol Touraine.
Ces « initiés », ce sont les patients qui vont d’emblée dans le meilleur hôpital car bien conseillés par leurs réseaux personnels. Avec le GHT, l’objectif est de créer des filières organisées et visibles pour que les « non-initiés » puissent eux aussi frapper tout de à la suite de la bonne porte.

La crainte des petits hôpitaux

Mais sur le terrain, de multiples résistances s’organisent. Certains estiment que le projet est surtout conduit avec une logique de productivité. Beaucoup de petits hôpitaux ont peur de disparaître en se faisant « manger » par les gros CHU.
« Cette crainte n’est pas fondée. La réforme va créer des équipes de médecins qui pourront aller d’un hôpital à l’autre. Ce qui permettra à un petit hôpital de continuer à vivre car des médecins du CHU viendront par exemple y faire des consultations certains jours de la semaine », souligne Gérard Vincent.

Pierre BIENVAULT, le 24/05/2016, La Croix.

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