
Tueuse silencieuse
Les raisons de ce désastre sont les mêmes que dans les pays plus développés. « Des facteurs de risque, qui agissent seuls ou en se combinant : le tabac, la sédentarité et une consommation excessive d’alcool. Sans oublier une alimentation transformée, trop riche en sel, en sucres et en matières grasses. Dans le contexte de la mondialisation, se nourrir de ces produits industrialisés est devenu, en Afrique, l’option la plus économique », déplore le docteur Varghese.Conséquence directe, le nombre d’événements aigus comme les infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux (AVC) explose. « Il y a dix ans, la première cause de consultation en neurologie était les infections du système nerveux central, comme les méningites, la toxoplasmose ou les abcès », note le docteur Laho Diallo, médecin chef du service de neurologie à l’hôpital de Kipé, en Guinée. « Désormais, la tendance a complètement changé. L’AVC est devenu la première cause d’admission aux urgences mais aussi la première cause d’hospitalisation en neurologie en Guinée. Les autres pays de la sous-région, comme la Côte d’Ivoire, le Bénin ou encore le Ghana, sont dans la même situation. C’est un véritable problème de santé publique. » En cause : l’hypertension artérielle, tueuse silencieuse qui abîme le cœur et les vaisseaux. C’est en Afrique qu’elle sévit le plus : en 2014, plus de 30 % des Africains de plus de 18 ans souffraient d’hypertension.
Des cancers mal traités
Le cancer est aussi devenu un problème de santé publique. « L’Afrique est concernée par tous les types », constate le docteur Varghese. Les cancers du col de l’utérus et du sein sont les plus fréquents chez les femmes. Les hommes, eux, sont touchés en premier lieu par le cancer de la prostate. Les cancers colorectaux et du poumon sont en train d’émerger, en lien avec l’adoption du tabagisme et de mauvaises règles diététiques. Mais la maladie a, sur le continent, ses spécificités : 25 % des cas sont dus à des infections virales chroniques. Les virus de l’hépatite B et de l’hépatite C exposent particulièrement les populations au cancer du foie. Le virus du sida peut, lui aussi, provoquer certains cancers, comme le sarcome de Kaposi, qui se manifeste par des tumeurs malignes sur la peau et dans les viscères.Diabète et obésité
Le diabète a également gagné énormément de terrain. Selon le dernier rapport de l’OMS sur l’épidémie, 3,1 % des Africains étaient diabétiques en 1980. Ils sont désormais 7,1 %, soit 25 millions de personnes. C’est pourtant une maladie encore largement méconnue : environ 70 % des malades ignorent qu’ils en sont atteints. Par ailleurs, les traitements, à base d’insuline et d’hypoglycémiants, ne sont accessibles que dans une minorité de pays. Le diabète non traité est source de très graves complications telles que la cécité, les accidents cardiaques, l’insuffisance rénale ou la gangrène des membres inférieurs. « C’est aussi un facteur de risque majeur d’accident vasculaire cérébral », rappelle le docteur Diallo.Beaucoup de décès dus aux maladies non transmissibles, de par les facteurs de risque qui les sous-tendent, pourraient être évités. Sur les 38 millions de décès provoqués par ces maladies en 2012, l’OMS estime que 16 millions, soit 42 %, étaient prématurés et évitables.
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