lundi 23 mars 2015

Fin de vie : l'aide active à mourir rejetée par les députés

L'aide médicalisée active à mourir, dont une partie des députés de la majorité considérait qu'il s'agissait d'une promesse de campagne de François Hollande, ne sera pas autorisée en France. Les trois amendements qui en proposaient la légalisation ont été rejetés à l'Assemblée, mercredi 11 mars, par 89 voix contre 70, lors de la deuxième journée d'examen de la proposition de loi sur la fin de vie déposée par Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP).


Avant le vote, les deux rapporteurs, qui souhaitaient, eux, que soit instaurée une sédation profonde et continue pour les malades en fin de vie, avaient prévenu qu'ils se retireraient si leur texte venait à être modifié d'une façon aussi substantielle.
Cet article central a finalement été approuvé par l'Assemblée dans la nuit. Cette possibilité de « dormir avant de mourir pour ne pas souffrir », selon l'expression d'un des deux auteurs du texte, Jean Leonetti, sera réservée à des malades atteints « d'une affection grave et incurable », et dans des situations précisement décrites par la proposition de loi, dont le vote solennel aura lieu le 17 mars prochain.

Les trois amendements qui légalisaient l'euthanasie ne sont pas passés. Ils avaient reçu un avis défavorable des deux rapporteurs de la proposition de loi Claeys-Leonetti.
Photo Reuters Philippe Wojazer

« Petit 49-3 sur la fin de vie »

 

Pour éviter toute mauvaise surprise, ils avaient demandé que les trois amendements soient débattus de façon prioritaire, immédiatement après les questions au gouvernement, afin qu'un maximum d'élus soient présents dans l'hémicycle. Une démarche qu'Olivier Falorni (PRG), partisan d'une aide active à mourir, qualifie de « petit 49-3 sur la fin de vie ». « Le gouvernement a eu peur de ne pas avoir la majorité », constate-t-il, regrettant que ce dernier « passe à côté d'une grande réforme de société ». « On n'instaure pas l'euthanasie par amendement, avec une majorité de circonstance », a fait valoir dans l'hémicycle le député UMP Bernard Accoyer.
L'amendement défendu par le député PS Jean-Louis Touraine, qui avait recueilli 122 signatures dans les rangs socialistes, a été rejeté grâce aux voix de l'UMP, dont la frange conservatrice s'est fortement mobilisée sur ce sujet. « Environ les deux tiers des députés de gauche étaient favorables à notre amendement, assurait M. Touraine à l'issue du vote. Les députés conservateurs ont refusé cette avancée, mais celle-ci est inéluctable. »
Fin janvier, la proposition de loi de la députée EELV Véronique Massonneau visant à légaliser l'euthanasie avait déjà été rejetée, après n'avoir recueilli que les seules voix des écologistes, des radicaux de gauche et de quelques élus socialistes.

Une première étape ?

 

La ministre de la santé Marisol Touraine, qui avait défendu en 2009, aux côtés de Manuel Valls une proposition de loi en faveur d'une aide active à mourir, a appelé à ne pas « brusquer la société française sur cette question ». La proposition de loi Claeys-Leonetti est « une avancée significative, majeure peut-être », a-t-elle fait valoir pour expliquer son soutien au texte. « Aujourd'hui, nous faisons évoluer le droit. Peut-être d'autres étapes viendront-elles ensuite ? »
En présentant la future loi comme une « étape », tout comme l'avait déjà fait Manuel Valls la veille, Mme Touraine a suscité l'« inquiétude » d'une partie de la droite. « Je ne considère pas qu'il y a une évolution inéluctable vers l'euthanasie ou le suicide assisté », a ainsi estimé Jean Leonetti, dont l'actuelle loi sur la fin de vie, votée en 2005, porte le nom. Le collectif pro-vie Soulager mais pas tuer a jugé que le terme employé par la ministre de la santé était « révélateur de l'ambiguïté de la posture gouvernementale » et a annoncé qu'il attendait de voir la suite des débats pour dire s'il appelait à une manifestation nationale sur ce sujet le 12 avril.

François Beguin, Le Monde, 11/03/2015.

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