lundi 23 mars 2015

IVG : la suppression du délai de réflexion divise



« Avancée » pour les féministes, « grave » pour l'Eglise : la fin annoncée du délai de réflexion imposé aux femmes souhaitant une interruption volontaire de grossesse (IVG) a suscité vendredi 20 mars des réactions aux antipodes.


Isabelle Fride, du Planning familial de Paris, rappelle qu'il s'agit d'une mesure demandée depuis longtemps. « C'était un frein supplémentaire et un facteur de culpabilisation. La majorité des femmes ont déjà réfléchi quand elles consultent la première fois », a-t-elle fait valoir.
Actuellement, deux consultations médicales sont obligatoires avant une IVG, avec un délai de réflexion d'une semaine entre les deux. Celui-ci est réduit à quarante-huit heures en cas d'urgence. Les députés ont supprimé ce délai en amendant en commission le projet de loi santé dans la nuit du mercredi 18 au jeudi 19 mars.

Même son de cloche du côté du collectif « Osez le féminisme ! ». Sa porte-parole, Claire Serre-Combe, a apporté un soutien complet à cette réforme, en abolissant un dispositif « infantilisant ».

Besoin de temps pour se rétracter ?

 

« Je ne savais pas que permettre aux femmes un minimum de recul était infantilisant », lui a rétorqué Mgr Guy de Kerimel, ancien président du groupe de travail sur l'avortement à la conférence des évêques de France.
« Vous avez sept jours pour vous rétracter quand vous achetez quelque chose à distance, onze pour signer un crédit : est-ce à dire que le petit être dans le ventre de sa mère est moins que cela ? » a ainsi plaidé l'évêque de Grenoble.
Un argument également développé par la députée Front national Marion Maréchal-Le Pen sur Twitter : "Quand on achète un micro-ondes sur internet on a 7 jours pour se rétracter. Mais pour avorter plus besoin."
« Comme si le degré de réflexion d'une femme qui prend la décision d'interrompre une grossesse était comparable à celui d'un consommateur qui revient sur un achat d'une cinquantaine d'euros ! » ont répliqué les Effrontées.

La clause de conscience

 

Si elles se réjouissent de l'abandon du délai de réflexion, les associations féministes regrettent le retrait d'un amendement sur la clause de conscience. Une députée avait proposé de supprimer cette dernière, qui permet aux médecins de refuser de pratiquer une IVG. Motif invoqué : elle est redondante avec celle s'appliquant à tout acte médical.
La ministre de la santé, Marisol Touraine, avait émis « un avis résolument défavorable » à cette proposition, jugeant qu'il ne fallait pas « ranimer de débat éminemment symbolique dans un contexte de tensions sur un certain nombre de sujets de société ».
Le sujet reviendra pourtant rapidement sur la table, lors de l'examen du projet de loi dans l'hémicycle, du 31 mars au 10 avril. Environ 210 000 interruptions volontaires de grossesse sont pratiquées chaque année en France, un chiffre stable.

Le Monde, 20/03/2015.

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