lundi 23 mars 2015

Nouvelle alerte sur les prothèses mammaires

Les autorités sanitaires alertent sur une augmentation récente du nombre de cas d’une forme très rare de cancer du système lymphatique, chez des porteuses de prothèses mammaires. Un premier cas, mortel, de lymphome anaplasique à grandes cellules avait été recensé en 2011 chez une femme ayant reçu un implant de marque Poly Implant Prothèse (PIP). Un avis d’experts issu d’une réunion plénière organisée le 4 mars par l’Institut national du cancer (INCa) et dévoilé mardi 17 mars par Le Parisien indique que 17 nouveaux cas ont depuis été signalés à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), uniquement chez des porteuses d’implants mammaires.


Ces signalements, et les 173 cas recensés dans le monde dans une étude publiée en 2014, conduisent les experts français à proposer une nouvelle dénomination dans la classification des cancers de l’Organisation mondiale de la santé, pour tenir compte de cette pathologie émergente. Ils suggèrent de retenir la terminologie de « lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire » (LAGC-AIM). « Il existe un lien clairement établi entre la survenue de cette pathologie et le port d’un implant mammaire », expliquent-ils dans leur rapport.
Ils ajoutent que « la fréquence de cette complication est cependant très faible » : l’avis souligne que l’évaluation des risques liés au port de prothèses « ne peut être que très approximative » : « une à deux femmes pour 10 000 porteuses d’implant(s) mammaire(s) pendant dix ans présenteraient un LAGC-AIM, sous réserve de la validité des hypothèses encore difficile à apprécier à ce stade », écrivent les experts.

Une prothèse mammaire PIP (photo d'illustration).
Photo AFP

Procès et instructions

 

Cette annonce repose la question, après le « scandale PIP », de la sûreté des implants mammaires, portés par 400 000 Françaises environ – à 83 % pour des raisons esthétiques. Révélée en 2010, l’affaire avait conduit la même année au retrait du marché des prothèses défectueuses et ouvert une série de procès et d’instructions judiciaires dont certaines sont toujours en cours. C’est lors du suivi sanitaire mis en place après cette contrefaçon que les cas de LAGC-AIM ont été recensés, dont 9 au cours de l’année écoulée.
Lors d’une conférence de presse, mardi 17 mars, la ministre de la santé, Marisol Touraine, a cependant appelé les porteuses d’implants à ne pas « céder à une inquiétude excessive ». Conformément à l’avis d’experts, elle a rappelé qu’il n’est « pas recommandé aux femmes porteuses de prothèses mammaires de se les faire retirer ». Agnès Buzyn, présidente de l’INCa, a expliqué que le lymphome incriminé était « le plus souvent de très bon pronostic », rapporte l’AFP.


Dans la série des 18 cas français, les femmes avaient un âge moyen de 63 ans. Huit femmes portaient un implant à caractère esthétique et dix avaient bénéficié d’une reconstruction mammaire liée à un cancer du sein. Elles avaient porté au total 35 implants, dont 8 de marque inconnue. Selon Le Parisien, 14 des 18 femmes diagnostiquées portaient des prothèses Allergan. Le fabricant américain indique « collaborer étroitement avec l’ANSM et les autorités de santé dans l’analyse et la détermination de l’étiologie du LAGC- AIM ».
Un groupe d’experts ad hoc va être réuni avant la fin mars pour étudier l’imputabilité de certaines prothèses, et notamment le rôle de leur texture, indique-t-on à l’ANSM – ces textures sont réputées offrir un meilleur maintien en place que les implants lisses. L’ANSM annonce aussi le redémarrage d’une campagne d’inspection chez les fabricants, axée sur les modes de signalement d’effets indésirables.
Que doivent faire les porteuses de prothèses ? Le ministère de la santé a mis en ligne un document à leur intention. Celui-ci rappelle que, comme pour toutes les femmes, une palpation des seins par leur médecin ou par une sage-femme est recommandée tous les ans à partir de 25 ans et, à partir de 50 ans, une mammographie tous les deux ans. C’est l’apparition de symptômes (épanchement, augmentation de volume, douleur, inflammation, masse, ulcération, altération de l’état général), après consultation, qui peut conduire à une décision de retrait, les experts ne recommandant pas à ce stade aux femmes porteuses de prothèses mammaires de demander cette « explantation » de façon préventive.

Hervé Morin, Le Monde, 18/03/2015.

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