vendredi 10 juin 2016

Michel Sidibé : « En 2030, on ne pourra plus dire que l’épidémie de sida nous fait peur »

Plus de 190 Etats membres se sont réunis du 8 au 10 juin à New York pour réaffirmer leur volonté d’éradiquer le sida. Entretien avec Michel Sidibé, directeur exécutif de l’Onusida.

 

Est-ce réaliste d’imaginer un monde sans sida d’ici 2030 ?


Michel Sidibé Nous n’aurons pas zéro infection au sida en 2030. Mais j’espère que nous serons capables de contrôler l’épidémie comme un problème de santé publique. En 2030, on ne pourra plus dire que cette épidémie nous fait peur et qu’elle concentre toute notre énergie et nos ressources. 
Les pays les plus touchés par le sida se trouvent en Afrique. Comment expliquez-vous que le virus continue à se propager dans ces régions-là ?
La partie délaissée, c’est surtout l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Car l’Afrique australe a fait des progrès incroyables. Aujourd’hui, on a pratiquement contrôlé l’épidémie dans la plupart de ces pays en termes de réduction de nouvelles infections et de réduction des décès. Dans un pays comme l’Afrique du Sud, on a pratiquement 3,3 millions de personnes sous traitement, c’est le programme le plus large de traitement mené dans le monde. On observe une baisse des nouvelles infections chez les enfants de 86 %. Même chose au Swaziland, au Botswana. Donc on est dans une situation que je considère plutôt très encourageante en Afrique australe.


Un chiffre témoigne tout de même de la prévalence de la maladie : le sida reste la première cause de mortalité chez les femmes de 15 à 44 ans. Comment cibler cette population-là ?
Tant qu’on ne met pas les femmes et les jeunes filles au cœur de nos préoccupations, on ne gagnera pas contre l’épidémie du sida en Afrique : 73 % des nouvelles infections se produisent chez les jeunes filles. Ce chiffre stagne depuis vingt ans. Donc il faut absolument se battre contre les violences faites aux femmes, encourager l’éducation à la sexualité et arriver à garder ces jeunes filles à l’école le plus longtemps possible. Ce sont des stratégies indispensables si on veut gagner contre la maladie.

 

En ce qui concerne les populations les plus discriminées, homosexuels, prostituées et toxicomanes, comment se passe la prise en charge ?


Cela reste assez timide. Les gens pensent encore que le sida est une épidémie hétérosexuelle. Mais on voit quand même des changements. J’étais récemment au Kenya. Il y a quelques années, on ne pouvait pas parler des gens qui s’injectent de la drogue. Aujourd’hui, nous avons un très bon programme de réduction des risques, comme au Sénégal qui vient de créer un centre pour les toxicomanes. Il y a donc des pays qui commencent à revoir timidement leur politique en matière de discriminations pour essayer de prendre en compte ces populations-là.
(...)

10/06/2016, Lire l'intégralité de l'article sur le site internet du Journal Le Monde : http://www.lemonde.fr

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