vendredi 7 décembre 2018

Ce que prévoit le gouvernement pour la loi de 1905



Régime administratif, statut et financement des cultes sont les trois grands axes de la réforme.


Le principe fondamental de la loi de 1905 «concernant la séparation des Églises et de l'État» ne devrait pas être touché par le projet de révision. Ainsi, la protection de «la liberté de conscience», intangible, est assurée par la République, qui «garantit» également «le libre exercice des cultes» à condition que ceux-ci n'entravent pas «l'ordre public». Autre concept intouchable, la neutralité de l'État. Il est contenu dans l'article 2 et ne bougera pas: «la République ne reconnaît, ni ne salarie ni ne subventionne aucun culte», à l'exception des services «d'aumônerie».

Seraient plutôt affectés les articles touchant le régime des cultes, soit le titre IV de la loi «Des associations pour l'exercice des cultes» et le titre V, «Police des cultes». Car la réforme vise la nature et la gestion des associations dites «1905» à vocation «cultuelle». À ne pas confondre avec «les associations loi 1901» à vocation culturelle, que tout le monde connaît en France puisqu'on estime à 1,3 million le nombre d'associations 1901 actives. Les associations cultuelles sont plus rares, même si on en compte tout de même 4 000. Ces associations 1905 sont la base et le pivot juridiques des entités religieuses en France.

Trois axes de réforme sont donc envisagés: le premier viserait à étendre le statut des associations 1905 à tous les lieux de culte, car tous n'y sont pas soumis, loin de là. Le deuxième axe touche la nature «religieuse» de l'association 1905 et les critères pour définir ce qu'est une association cultuelle. Le troisième entendrait renforcer le contrôle financier, notamment quant aux flux étrangers.


Un label qualité «cultuelle»


Premier acte, donc: faire rentrer tous les lieux de cultes sous le régime de la loi de 1905. Cela peut paraître surprenant, mais les deux tiers des 4 000 associations cultuelles sont… protestantes, quelques centaines sont juives, d'autres orthodoxes et catholiques, très peu sont musulmanes. L'histoire est passée par là, mais la politique également. Il a été souvent jugé plus simple, par les mairies notamment mais aussi les préfectures, pour faciliter certaines subventions locales, d'ériger des mosquées sous couvert d'associations 1901 à vocation culturelle! L'astuce consistant à appliquer cette définition administrative non pour la salle de prière en elle-même mais pour ses annexes, bibliothèque, salle de cours, etc.

L'idée phare de la réforme consiste non pas à supprimer les associations loi 1901 qui sont derrière les 2 500 lieux de culte musulmans en France, mais à créer, pour chaque mosquée ou simple salle de prière, une association loi 1905, cultuelle, en bonne et due forme.

Deuxième visée de la réforme: requalifier la nature des associations 1905. Elles doivent toujours avoir «exclusivement pour objet l'exercice d'un culte», plus précisément «les frais, l'entretien et l'exercice public d'un culte», mais le gouvernement voudrait délivrer une sorte de label, authentifiant la «qualité cultuelle» de l'association. Sur la base de critères plus précis, mais surtout révisable tous les cinq ans par l'autorité préfectorale.

La vigilance serait renforcée sur le contrôle des membres des conseils d'administration de ces associations pour éviter des prises de pouvoir par «entrisme» de groupes radicaux, comme cela s'est déjà produit dans plusieurs mosquées. La «qualité cultuelle» de l'association regardera aussi le recrutement du prédicateur mais aussi ses dérapages idéologiques éventuels, qui seraient davantage sanctionnés. Même si la loi de 1905, en son article 35, prévoit déjà un train de mesures sévères pour parer «une provocation directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de l'autorité publique».

Troisième axe, les flux et le contrôle financiers. Cette réforme pourrait autoriser les associations 1905 à gérer des «immeubles» comme source de revenus. La mesure est très attendue par les religions et a été rejetée l'hiver dernier à l'Assemblée. Avec la contrepartie d'un renforcement d'un contrôle comptable, pourtant déjà très contraignant actuellement, mais cela permettrait de rendre transparent, en le traçant, tout apport financier venant de l'étranger, dont le montant serait limité par la loi.

Source : Le Figaro, 21/11/2018.

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