samedi 13 septembre 2014

C'EST TOUT NET ! Chronique Rires illicites

On pouffe. On s'esclaffe dans mon open space. Ici, à gauche. Et puis la vague se propage sur ma droite. M'épargnera-t-elle ? Les écrans (ac)cueillent les éclats de rire de ceux qui leur font face. Certains quémandent le lien qui provoque cette hilarité galopante. D'autres le reçoivent spontanément, jeté par la fenêtre de leur Gtalk. Ce doit être un lien vers un fait de l'actualité, incongru, burlesque ou abracadabrant, un GIF savamment réalisé ou encore une irrésistible vidéo. Tous sont susceptibles de soutirer à l'internaute a minima un sourire. Et ainsi enfle le buzz…
Le rire est, pour plus de deux tiers des salariés français, " le rempart le plus efficace contre le stress au travail ", souligne le site Coaching.monster.fr. Pourtant, le bureau est un lieu jugé peu propice aux parties de franche rigolade, considèrent les salariés sondés par Monster.fr. Toujours selon une étude du spécialiste de la gestion de carrière et du recrutement en ligne, " le rire est contagieux et crée des liens ", et notamment," en groupe, on rit en moyenne trente fois plus que tout seul ", ce qui augmenterait bien-être et performance au travail. Enfin, " rire n'est pas un manque de professionnalité ".
Dans l'article " Le rire dans les relations de travail ", paru dans la Revue française de sociologie en 1961, et précieusement conservé par le site Persee.fr, son auteure, Jacqueline Frisch-Gauthier, loin de toute vision d'un Internet mondial et son lot de LOL, écrit que " rire ensemble suppose certaines attitudes communes et fait naître en même temps des liens affectifs " (lemde.fr/1wihGWl).
Faute grave
Sur Twitter, @EricRocheblave ne le voit pas de cet œil-là. L'avocat au barreau de Montpellier et spécialiste en droit du travail signifie dans un tweet qu'" envoyer à ses collègues de travail des vidéos humoristiques peut être une faute grave " et nous renvoie sur son blog au cas de M. X (lemde.fr/1CZRZys). Ce dernier a été licencié pour faute grave après que son employeur a établi qu'il avait adressé à ses collègues 178 courriels accompagnés de vidéos à caractère sexuel, humoristique, politique ou sportif, et ainsi enfreint le règlement intérieur de l'entreprise " prohibant les connexions sur Internet à des fins personnelles ".
Ça pouffe. Ça s'esclaffe dans mon open space. Ici, à gauche. Et puis la vague se propage sur ma droite. Notre allégresse est-elle hors la loi ? Sans rire ?

par Marlène Duretz, duretz@lemonde.fr

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