mardi 23 septembre 2014

Ebola : l'OMS prévoit jusqu'à 20 000 cas d'ici à novembre

Les prévisions sur l'épidémie de fièvre Ebola s'assombrissent. Le virus a déjà touché 5 843 personnes, dont 2 803 mortellement, en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone, selon le bilan publié lundi 22 septembre par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). " L'épidémie s'accroît à une vitesse exponentielle dans les trois pays ", constate Christopher Dye, directeur de la stratégie à l'OMS. Si rien ne vient freiner sa progression, elle pourrait atteindre 20 000 cas dès le 2 novembre, et non fin décembre comme prévu initialement.


Une tendance que met en évidence une étude publiée mardi dans le New England Journal of Medicine. Les auteurs, experts de l'OMS et de l'Imperial College de Londres, analysent les neuf premiers mois de l'épidémie et présentent des projections pour les prochaines semaines.
Sur la base des meilleures données disponibles (les 4 500 cas recensés au 14 septembre), il apparaît qu'une personne infectée en contamine directement deux autres. Ce taux est légèrement inférieur en Guinée et au Liberia à ce qu'il est en Sierra Leone.
Des chiffres minorés.
Le temps moyen d'incubation est de 11,4 jours, et il ne varie pas entre les trois pays. Le virus Ebola touche de manière équivalente les hommes et les femmes dans les trois pays les plus affectés. Mais les soignants paient un lourd tribut : plus de 150 d'entre eux ont été infectés et au moins 80 en sont morts. Le taux de décès atteint 80 % parmi les soignants infectés au Liberia.
Puis les experts ont tenté d'établir des projections pour les semaines à venir, sachant qu'au-delà les prévisions n'ont plus beaucoup de sens. " Nous estimons que, au rythme actuel d'augmentation, dans l'hypothèse où il n'y aurait pas de changement dans les efforts de contrôle de l'infection, le nombre cumulatif de cas confirmés et probables atteindrait le 2 novembre (à la fin de la 44e semaine de l'épidémie) 5 925 en Guinée, 9 939 au Liberia et 5 063 en Sierra Leone, soit plus de 20 000 cas ", selon les auteurs.
Leurs chiffres seraient similaires à ceux que s'apprêtent à publier cette semaine les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) d'Atlanta, qui ont analysé les données du Liberia et de la Sierra Leone. " Les CDC estiment que les deux pays compteront 8 000 cas fin septembre, quand notre estimation est de 7 000 cas à cette date ", commente Christopher Dye.
Les CDC ont tenté d'évaluer la sous-déclaration des cas, et ils estiment qu'il faut multiplier par 2,5 les chiffres officiels actuels. Selon l'agence Bloomberg, qui s'est procuré des éléments du rapport, dans le scénario le plus pessimiste, celui où la réponse à Ebola resterait en l'état, l'épidémie pourrait au total affecter 550 000 personnes.
" Nous sommes dans la troisième vague d'accroissement de l'épidémie, pointe M. Dye. Nous n'avons pas d'indication rassurante sur la hausse exponentielle des infections. Si nous ne parvenons pas à la ralentir, ce ne seront plus des centaines de cas par semaine, mais des milliers que nous aurons, qui entraîneront des milliers de morts. "
Pour M. Dye, l'actuelle épidémie est exceptionnelle, mais les moyens sont connus pour l'arrêter. La réponse repose sur les mesures de contrôle et de prévention de l'infection, la protection précoce des malades et des soignants, la détection des personnes en contact avec quelqu'un d'infecté. Au Nigeria, l'épidémie a été contenue à 20 cas. " Si nous parvenions à diviser par deux la transmission, nous pourrions inverser la tendance. Mais, ici, il faut le faire à grande échelle. Cette épidémie est comme une série d'incendies qu'il faudra éteindre un par un ", souligne Christopher Dye. Nul doute que ceux des bidonvilles de Monrovia, la capitale du Liberia, seront parmi les plus difficiles à maîtriser.
Paul Benkimoun.
Article publié dans le journal Le Monde du 24 septembre 2014.

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