jeudi 4 septembre 2014

LE LIVRE Le cri du cœur d'un jeune chômeur

Petite lecture de la rentrée



Le Bomeur, une vie de bobo chômeur est le premier et le dernier livre de Nathanaël Rouas. Il s'agit d'un récit autobiographique, et non d'un roman ou d'un essai qui pleurerait sur le sort d'une jeunesse sacrifiée sur l'autel de la crise économique : un cri du cœur, presque un coup de gueule. C'est le témoignage d'un jeune " au parcours sans fautes ", bac + 5, ambitieux, plutôt bourgeois de condition sociale, enfin bobo (bourgeois bohème). Il est directeur de création dans une agence de pub le jour où, à 26 ans, il prend sa première claque : sa société est liquidée, il se retrouve au chômage ; une situation dont il n'avait jamais imaginé qu'elle pourrait le concerner.
Bobo et chômeur à la fois… Un cocktail qui fait de lui un personnage romanesque qui vit au rythme du zapping, des relations éphémères. Mais qui garde la face, quoi qu'il arrive, en se drapant dans la désinvolture, ultime protection de sa dignité…
Exutoire à la colère de toute une génération
**" Tu vas voir, Nat - hanaël - , au début c'est trop cool, hein, le chômage, en plus, toi, c'est en plein pendant l'été, c'est juste des vacances prolongées pour le moment.
— Franchement, c'est mortel, j'en avais besoin en plus, je commençais à fatiguer. "
**Mais le travail n'est pas un objet comme un autre, c'est ce que Nathanaël semble découvrir et dévoile jour après jour au lecteur dans son introspection. " C'est bizarre comme sensation de voir tout le monde retourner au travail et de se dire qu'on n'en a pas. "
De la première à la dernière page, le livre ne se départ pas de sa légèreté, portée par un style aux phrases fleuries de grossièretés et de néologismes SMS, comme pour mieux faire contrepoids à l'importance du statut social qu'il a perdu, et dont l'absence lui pèse chaque jour un peu plus : " Je suis une merde " ; " Ne me regardez pas comme ça, bordel ! "
Quelque 260 pages en guise d'exutoire à la colère ? Probablement, mais pas seulement celle de Nathanaël, celle de toute une génération. Nathanaël se raconte en " bande ", car ils sont nombreux, les " bomeurs " aux terrasses de café qui continuent à donner le change, à esquisser des projets pour se reconvertir jusqu'à ce que " leur dernière miette d'ego " soit rongée par le sentiment d'exclusion.
Sauf s'ils rebondissent, comme Nathanaël. Mais il le jure, il ne sera plus salarié !
Anne Rodier

Le Bomeur, une vie de bobo chômeur
Nathanaël Rouas, Robert Laffont, 264 pages, 18,50 euros.
Via le site Le Monde.fr

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